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1995

L'honneur d'un commandant

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Par Le Naire Olivier, publié le 09/11/1995

Jean-François Deniau a lu pour L'Express les Mémoires d'Hélie de Saint Marc.

Découvert par le grand public en 1988 grâce à son neveu et biographe Laurent Beccaria, Hélie de Saint Marc revient aujourd'hui dans ses Mémoires sur son incroyable destin: la résistance à 19 ans, Buchenwald à 20 ans. Puis Saint-Cyr, la Légion, l'Indochine, la guerre d'Algérie, le putsch des généraux, la prison... Une très belle réflexion sur la fidélité, l'amour, la mort et l'homme en qui les nazis ne voulaient voir «qu'une petite fumée bleue s'envolant des crématoires». 

L'EXPRESS: Connaissiez-vous personnellement Hélie de Saint Marc avant de lire ses Mémoires? 

JEAN-FRANÇOIS DENIAU: Non, même si nous nous sommes sans doute croisés en Indochine ou en Algérie. En fait, c'est dans ce livre que je l'ai rencontré, au sens le plus fort du terme. Au fil des pages, j'ai retrouvé le monde dans lequel j'ai grandi, ces valeurs qui m'ont été inculquées dans mon enfance, qui ont gouverné ma vie et sont désormais considérées comme ringardes et réactionnaires. Dans ma famille, il y avait presque un culte de l'Empire, et on apprenait tout jeune, avec Kipling (ou avec Lyautey!), le respect des autres et de soi-même, fondé sur une morale et des devoirs. Le mot «mission» était le plus important du vocabulaire. J'ai été élevé dans l'amour de ma patrie, qu'on appelait alors «la plus grande France», et tous ceux qui ont connu ce monde seront émus de le retrouver dans ces pages.
Pour la plupart des jeunes qui ont 20 ans aujourd'hui, c'est du passé! 

Cela m'est égal. La mode, c'est ce qui se démode. Dans les manuels scolaires, l'Indochine ou l'Algérie sont abordées de manière caricaturale. Aucun grand film n'a vraiment traité cette époque comme les Américains l'ont fait pour la conquête de l'Ouest. Le livre d'Hélie de Saint Marc est l'occasion unique de revivre cette aventure, cette épopée. Il n'y a pas de meilleure éducation que l'exemple. Il n'y a pas non plus de plus beau roman que la vie. Saint Marc a vécu tous les grands événements de ces cinquante dernières années. A l'heure où tant de gens se replient sur eux-mêmes et disent: «Ce n'est pas mon problème», il prouve magnifiquement qu'aucun homme n'est une île. 

Qu'est-ce qui vous a le plus touché dans ce livre?
Le chapitre sur la survie dans les camps de concentration, bien sûr. Certaines citations, anonymes, comme celle-ci: «Enfants, profitez de la guerre, la paix sera terrible»... Mais aussi le récit du déchirement quand on l'oblige à abandonner toute la population d'un poste perdu en Indochine. Peut-être est-ce ce souvenir-là qui amènera plus tard Saint Marc à rejoindre les putschistes en Algérie. 

C'est l'aspect le plus contestable de la carrière d'Hélie de Saint Marc.
Qu'auriez-vous fait à sa place?
Je n'étais pas à sa place. Juger de son fauteuil, après coup, c'est trop facile. J'avais plus de doutes que lui sur la possibilité pratique d'une Algérie française. C'est une différence. J'aurais réagi, je l'espère, comme lui sur l'engagement personnel, la fidélité à la parole donnée. Mais il a entraîné un régiment dans sa rébellion, et cela, je crois que je ne l'aurais pas fait. Je ne le juge pas pour autant. Un jour, de Gaulle m'a demandé à propos de l'Algérie: «Deniau, vous trouvez que c'est du travail salopé? - Oui, mon général, ai-je répondu. - C'est vrai, a dit le Général, c'est du travail salopé, mais je n'ai pas eu le temps.» Hélie de Saint Marc, lui, a refusé les considérations et les attendus, et il a payé le prix fort: six ans de prison. 

C'est une leçon?
Sûrement. Tout soldat peut avoir à dire non un jour dans sa carrière. De Gaulle en sait quelque chose. Aujourd'hui, par exemple, je l'ai dit, je l'ai écrit, il y avait des missions que l'armée française a remplies, en ex-Yougoslavie, avec un courage et un dévouement extraordinaires, qui pour moi n'étaient pas dans son rôle. Il fallait dire non. Le livre d'Hélie de Saint Marc rappelle qu'il faut garder sa capacité de dire non. C'est ça, le vrai courage, la dignité humaine. Un homme à main nue qui dit non à l'Histoire, aux événements. Il n'y a rien de plus bouleversant. 

Mémoires. Les Champs de braises, par Hélie de Saint Marc, avec la collaboration de Laurent Beccaria. Perrin, 340 p., 129 F. 


Traduction

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