AALEME

Légionnaire toujours...

  • Plein écran
  • Ecran large
  • Ecran étroit
  • Increase font size
  • Default font size
  • Decrease font size

2015


Les premières années de Diego Suarez - 1884-1885 : L'occupation de la baie par les français

Envoyer

Lundi, 16 Février 2015 08:09

Le village d’Antsirane vu du fortin en 1885

L'intérêt de la France pour la baie de Diego Suarez vient de loin... Déjà, en 1832, le comte de Rigny, ministre de la Marine, envisageant d'installer à Madagascar un « établissement maritime » chargea le contre-amiral Cuvillier, gouverneur de Bourbon de faire explorer la baie de Diego. Cette exploration fut exécutée en 1833 par la corvette La Nièvre, par le commandant

Cependant, en raison des dépenses considérables qu'il aurait occasionnées, le projet fut abandonné « quelque utile qu'il dût être pour la France de posséder un port dans une mer où nous en manquions absolument ». L'occasion de réaliser ce rêve fut fournie par la guerre franco-hova de 1884-1885.

1884 : Détruire les postes merina

Les revendications françaises qui s'appuyaient sur des «droits anciens« consécutifs à de précédents traités débouchèrent sur la guerre de 1883. Le 17 mars 1883, le Ministre de la Marine envoie les instructions suivantes au contre-amiral Pierre, commandant en chef de la division navale des Indes, à bord de la Flore : « Vous ferez disparaître les postes établis par les Hovas sur les parties de la côte placées sous notre protectorat ou notre souveraineté [...] vous aurez à faire évacuer les postes qui pourraient exister également dans cette dernière région (Nord-est), notamment celui d'Antsingy -baie de Diego Suarez ». Il s'agit, bien sûr du fameux fort d'Ambohimarina, dans la montagne des français, (dont nous avons parlé longuement dans le n° 25 du 6 avril 2011 de la Tribune de Diego) et où les merina étaient installés depuis 1828. Dès mars 1884, à la Chambre des députés française, certains demandèrent l'occupation de « certains point de la côte, notamment la baie de Diego-Suarez qui nous assurerait de bons ports ». Le 18 janvier 1885 le Contre-Amiral Miot, commandant la flotte de l'Ocean Indien écrivait au Ministre de la Marine : « Je vais maintenant m'occuper de Diego Suarez. Les reconnaissances vont incessamment commencer relativement à Antombouc. Les Hovas sont là 7 à 800 dans une position naturelle des plus montagneuse ».

1885 : L'occupation de la rade

Le 15 février 1885 Miot écrit : « Je n’ai pas jugé nécessaire d’envoyer des troupes à Diego Suarez pour le moment. Tout cela à besoin d’étude, de prudence, et de préparations afin de ne pas s’embarrasser de conquêtes inutiles ; le peu de monde dont je dispose m’oblige à beaucoup de mesure. Néanmoins la rade est occupée. J’y enverrai en temps et lieu les baraques et les 40 ou 50 hommes que j’y destine. Nous pourrions y établir peu à peu un dépôt de charbon. Il y a là des emplacements très convenables à cet usage ». Le 17 février 1885: le transport la Creuse, venant de Tamatave mouille dans la baie et en prend possession au nom de la France. A cette occasion, le journal Le monde illustré évoque cet évènement en ce termes : « Le 15(?) février dernier, le pavillon français était officiellement hissé sur l'îlot Clarence, qui commande l'entrée de la baie de Diégo. Les Hovas, chassés des villages de la côte, se réfugiaient dans les montagnes où ils occupent depuis lors le fort d'Ambohemarina, véritable nid d'aigle, situé à une hauteur de 350m, sur une montagne rocheuse presqu'inaccessible ». Si cette information, ainsi que celles qui suivent dans cet article, comporte certaines erreurs, elle témoigne de l'intérêt que les lecteurs français portaient à cet évènement, qui sera relaté dans de nombreux récits. Voici la description que donne Humbert dans son ouvrage Madagascar : « Le village d'Antsirane, habité par quelques familles sakalaves, est immédiatement mis en état de défense; des reconnaissances rayonnent dans l'intérieur, dans le but d'assurer le ravitaillement en viande fraîche et de se renseigner sur la situation des Hovas dans la région. Ceux-ci occupent à Ambohemarina, à quelque kilomètres de Diego-Suarez, un rova perché comme un nid d'aigle au sommet d'une montagne; les pentes ont été escarpées, seuls des escaliers étroits taillés dans le roc, permettent l'accès à l'ouvrage ».
Dans L'Afrique pittoresque Charles Ségard nous donne de l'arrivée de la Creuse une des description plus... pittoresque : « La Creuse a ralenti son allure ; l'équipage est au poste de combat, paré à toute éventualité. Bast! personne! Nous franchissons l'entrée, et nous voilà dans la baie [...] A gauche, on distingue quelques cases groupées au bord de l'eau, à l'abri d'un de ces fouillis : des pirogues halées sur la plage et figurant de grands cétacés échoués [...] Pas d'autres vestiges de la présence de l'homme [...] Nous allons plus avant, et l'on signale au fond d'une des baies deux ou trois coutres (sic), taillés sur les gabarits de l'arche de Noé et pareils à ceux qui, faisant le commerce sur la côte nord-ouest, viennent généralement de l'Inde. Enfin nous stoppons ; la Creuse est mouillée ; mais, juste ciel! que nous sommes éloignés de tout ! la plus voisine des terres est au moins à deux milles de notre bateau. [...] Un officier est allé, avec un canot armé, reconnaître les coutres ; ils sont montés par des Indiens et des Antalotes. A l'arrivée de la Creuse, l'un d'eux a substitué diplomatiquement à son pavillon arabe le pavillon français [...] leurs équipages sont en train de charger du riz près d'un imperceptible village, où, le matin encore deux douaniers hovas exerçaient leurs fonctions. Mais notre approche a mis en fuite ces employés, leurs familles et leurs bœufs, qui se replient vers l'intérieur. En effet, les trafiquants disent que par derrière ces premiers plans de montagnes, sur un plateau de calcaire, il existe " un fort redoutable avec plus de quatre cents hommes armés de fusils et de canons ". Au demeurant, d'après les renseignements puisés à la même source, on peut s'égarer de chaque côté de la baie, à sept ou huit kilomètres, sans avoir à redouter la rencontre d'un ennemi ». En fait, les Merina qui s'étaient transportés à Anamakia en avaient été chassés le 14 février 1885 et le 11 mars, ils durent également abandonner Antanamitarana où ils s'étaient repliés.

Ambohimarina

Le 14 mars 1885 le contre-amiral décrit les opérations contre les positions Hova. « Les reconnaissances des positions Hovas qui défendent l’extrémité nord de l’île, se sont opérées avec succès et deux obus, envoyés par leBeautemps-Beaupré, sur le camp ennemi, sont tombés au milieu, à une distance de 7200 mètres. Des hommes ont gravi un morne carré, accessible du mouillage, et sur lequel une pièce de 80 m/m mise en batterie, peut tirer avec succès à 3000 mètres sur le camp. Ce camp que les indigènes nomment Amboémarina, comprend comme la plupart des ouvrages Hovas, une enceinte palissadée et un grand village intérieur. Il occupe, et c’est là sa force, le sommet d’une montagne dont la hauteur n’est pas moindre de 300 mètres. Les versants sud, est et ouest de la montagne présentent des pentes abruptes ; les quelques mauvais sentiers qui conduisent au sommet sont naturellement obstrués et coupés par les Hovas. Au nord ouest, la montagne d’Amboémarina est reliée au massif montagneux qui se prolonge au nord, dans la direction de Diego Suarez, par un contre fort très élevé, mais qui est cependant dominé par les hauteurs du rova Hova. Dans ce voisinage l’accès de ce contrefort est très difficile et pourrait devenir dangereux pour l’assaillant.Al’est, la montagne dont je viens de parler, est dominée par le morne carré dont elle est séparée par une vallée profonde. Du sommet du Mont carré, on peut canonner le camp à la distance de 3000 mètres, mais le transport d'un canon de 80 m/m de campagne présente de grandes difficultés. La distance du camp à la baie est de 7200 mètres, celle de la baie au mont carré de 4100 mètres environ. La garnison de ce camp comprend 800 Hovas et environ 1200 Sakalaves, contraints par la force. Il y a 5 mauvais petits canons et l’armement des hommes consiste en fusils à pierre. Seulement dans cette superbe situation militaire et sur ce large plateau si difficile à gravir, il existe un immense approvisionnement de riz, des bœufs en quantité et deux sources d’eau excellente. Les Hovas qui y sont établis y sont depuis longtemps ; c’est une colonie formée par eux ; ils y ont fait souche et sont dans des conditions de santé bien supérieures à tous ceux qui habitent les autres parties de la côte. Il y a 3 mois qu’ils n’ont plus aucune communication avec la capitale. Ils sont donc voués à la soumission. Un bombardement méthodique, fait de la baie d’Amboudivahibé, forcerait l’évacuation. Il faudra alors cerner la montagne dans la vallée pour empêcher la fuite des hovas. J’estime nécessaire une colonne de 400 hommes et environ 500 à 600 porteurs ; mais c’est une opération que je ne pourrait tenter que vers le mois de mai. La baie d’Amboudivahibé est largement ouverte aux vents de NE. Il faudra donc attendre que la mousson de S.E soit bien établie pour amener là 2 bâtiments et le personnel nécessaire. Jusque là, et quand même, nous pouvons commencer nos établissements de Diego Suarez.»

Les premières installations:

Miot les décrit ainsi dans son rapport : « Depuis la prise de possession par la Creuse, les Sakalaves rallient peu à peu. Nous possédons là un admirable port, facile à défendre et dont la possession vaut à elle seule tous les sacrifices qu’on peut faire ici. Nous pouvons déjà sans danger, avec sécurité, commencer à y accumuler, si nous le désirons, vivres, charbon, rechanges, ateliers, tout ce qui peut être nécessaire pour ravitailler notre station de la mer des indes. Rien qu’en y envoyant le rebut de nos ports, nous pouvons établir ici un lieu de refuge et de réparations. Le port de la Nièvre, qui s’ouvre au fond de la baie de Diego Suarez, peut facilement, et à l’aise, contenir au moins six cuirassés. Ils y trouveraient un abri sûr et ne pourraient être exposés aux coups venant de l’entée qui est située à 11000 mètres environ dans le N.E. Tout cela est occupé maintenant, nous n’avons qu’a y envoyer ce qu’on voudra. J’y mettrai plus tard quelques soldats et je crois nécessaire d’y établir un capitaine de frégate quand la Dordogne y prendra station.»

Emplacement du futur port en 1885. On aperçoit le fortin sur la crète

Ce capitaine de frégate, c'est le commandant Caillet qui sera le premier « commandant particulier de Diego-Suarez ». Installé sur la Dordogne, il reçoit, en octobre 1885 la visite du Député de La Réunion François de Mahy, ardent partisan de la colonisation de Madagascar, qui nous décrit son escale à Diego en octobre 1885. « J'ai eu le plaisir de retrouver à Diego Suarez un ami, M. le capitaine de frégate Caillet, commandant supérieur du nouvel établissement. [...] Nous avons mis pied à terre au village d'Antombouck ou Antsirane, composé d'une vingtaine de paillotes malgaches, abritant une population très pauvre, de cent vingt ou cent cinquante habitants. A gauche du village, le casernement de nos soldats, très bien conditionné. » Mais des escarmouches opposent encore les soldats français aux troupes merina : c'est ce que constate Fraçois de Mahy dès son arrivée : « Nous avons eu hier une petite alerte. Au moment où nous sortions de table, à bord de la Dordogne, chez M. le commandant Caillet, commandant supérieur de Diego-Suarez, on a entendu quelques coups de fusil à terre. - Vite, branle-bas de combat à bord de la Dordogne, échange de signaux avec la terre. Nous regagnons notre Bisson avec le commandant Poudra. Le commandant Caillet descend avec sa compagnie de débarquement pendant que le Bisson fait aussi branle-bas et braque ses canons en attendant les ordres du commandant supérieur. Nous avons ainsi été tenus en haleine jusqu'à onze heures et demie ». Mais les menaces hova ne semblent pas inquiéter l'Amiral Miot qui écrit : « A Diego Suarez, la Creuse fait le meilleur effet. Quelques villages Sakalaves se groupent sous la protection de ses canons, mais leur timidité est encore excessive et les bruits que l’on répand parmi eux de notre prochaine évacuation empêchent ceux de l’intérieur de nous rallier franchement. Ils se prononceraient sans hésitation si les Hovas étaient chassés du fort d’Ambohémarina, situé à 30 kilomètres dans l’intérieur, et dans une situation qui défie tout assaut. D’ailleurs les Hovas d’Ambohémarina ne nous empêchent pas de nous établir à Diego Suarez. Il sont plus préoccupés de leur sécurité que des moyens de nous inquiéter. Un incident est à noter lors d’une reconnaissance en avant dans les plaines du sud : elle revenait avec un convoi de zébus lorsqu’elle essuie deux ou trois coups de feu à 80 mètres de distance de la lisière d’un bois, blessant l’enseigne de vaisseau Crova et le matelot Cormerais. 200 Hovas descendent alors de la montagne pour attaquer la colonne ; le maître voilier de la Creuse Tison, qui avait pris le commandement du détachement déploie ses 40 hommes et quelques feux de salves suffisent à disperser les Hovas qui laissent sur le terrain une douzaine de cadavres ». Cependant de légères fortifications ont été mises en place à Diego : « J’ai fait construire deux petits fortins destinés à protéger le village d’Antsirane, plutôt pour rassurer les réfugies qui viennent jusqu’à nous, que pour nous défendre contre toute agression des Hovas ». Ces deux petits fortins, construits sur les pentes du plateau, en bois, seront rapidement remplacés par des défenses plus solides, à Cap Diego, que Miot évoque dans un courrier. « L’emplacement pour recevoir un casernement est choisi dans les meilleures conditions. Il y a une baignade, de l'ombre, une falaise qui l’abrite des grands vents de sud. Le terrain forme un vaste rectangle de 70 mètres de longueur sur 47 de largeur. Les planchers des cases seront élevés de 0,75 au dessus du sol. L’anse du cap Diégo se prête, à tous points de vue, à la création d’un établissement maritime pouvant contenir des hangars à charbon, des magasins-dépôts et des ateliers de réparation. Avec une jetée de 20 à25 mètres de longueur et un développement de 150 mètres de quai construits en déblai, et au moyen de d’une simple entaille au pied du versant nord de la montagne, on peut faire de l’anse de Diégo, un petit port très bien fermé où des navires calant 5 mètres pourront venir s’amarrer bord à quai, à marée, basse. Ces travaux seront d’une exécution facile et peu coûteuse, attendu qu’on a sous la main tous les matériaux de constructions, blocs pour les enrochements et pour le massif intérieur de la jetée et des quais, moellons de choix, pierres de taille, sable et calcaire pour la chaux et même pour le ciment. La falaise qui borde au nord l’anse de Diégo renferme, par grandes masses, dans sa partie supérieure des argiles éminemment propres à la fabrication des tuiles et de la brique. A 100 mètres du cap existe une source d’eau vive, abondante en toutes saisons, qui jaillit des flancs boisés de la falaise à 12 mètres environ des hautes marées.»
Mais ces installations défensives n'empêchent pas Miot d'envisager une offensive contre les Hovas repliés dans leur forteresse d'Ambohimarina. Cependant, les choses vont changer avec le Traité du 17 décembre 1885 signé avec le Gouvernement de la Reine de Madagascar et qui accorde à la France « le droit d'occuper la baie de Diego-Suarez et d'y faire des installations à sa convenance ». La France gardera le territoire de la baie, étroitement circonscrit dans des limites que les français ne cesseront de franchir tandis que les hovas continueront à gouverner, au nom de la Reine, du haut de la forteresse d'Ambohimarina, dans la Montagne des français, la province d'Antomboko.

■ Suzanne Reutt


La longue histoire de Vohemar - 5ème partie : Vohemar, d’une guerre à l’autre...

Envoyer

2 février 2015

Vohemar, la rue principale
Vohemar, la rue principale

Après la prise de Vohemar, le 21 novembre 1884, puis des deux forts d’Amboanio et d’Andraparany en décembre, la région de Vohemar passa sous l’autorité française. Elle n’allait pas y rester longtemps...

L’organisation de l’occupation de Vohemar

Après la prise d’Andraparany, les Hovas s’étaient retirés du district de Vohemar. Or, cette région étant alors considérée comme une des plus riches du Nord de Madagascar, les français décidèrent d’en organiser l’occupation. Considérant que Vohemar n’était « qu’un entrepôt » (Humbert), ils s’installèrent d’abord à Amboanio à environ 18 km de Vohemar. Le rova d’Amboanio, qui avait été pris aux troupes hovas, fut restauré. Ce fort, constitué d’une enceinte rectangulaire de 70 mètres de long sur 120 mètres de large, entouré de pieux très serrés, de 4 m de haut et de 20 cm d’épaisseur, en bois dur, représentait une place facile à défendre. On y installa donc des casernes pour deux compagnies et des magasins contenant trois mois de vivres. Sous le fort, se trouve le village dont le Père Cros, envoyé comme missionnaire le 1er février 1885 donne une description : « Ambouanio (sic) est un grand village situé sur un mamelon qui domine d’immenses vallées où coulent d’un côté le fleuve Tanambaka et de l’autre, la rivière Manambery. Il y a, dit-on, trois cents cases et treize à quatorze cents habitants ».
Dès le 8 janvier 1885, l’Amiral Miot vient visiter Vohemar et met en place un semblant d’organisation. D’après Huart dans son livre La guerre illustrée « quand nous (les français) avons pris ce village, cette localité comptait au maximum 300 habitants [...] La ville blanche, habitée par une dizaine de traitants européens ou créoles, une vingtaine d’indiens de Bombay et quelques arabes, était d’une simplicité rudimentaire, à ce point que la maison du vice-consul anglais (un mauricien) était couverte en paille...». La plupart des responsables sont évidemment militaires : le commandant en chef de la ville est le Commandant Escande, capitaine du Beautemps-Beaupré ; le commandant du port est le lieutenant de vaisseau Duvergé, le capitaine d’artillerie Brun commande le fort d’Amboanio. Mais des civils sont également nommés, notamment le « Directeur des Indigènes ». C’est quelqu’un dont nous avons déjà parlé : M. Guinet, ancien agent de la Compagnie de Madagascar, qui a l’immense avantage de parler couramment le malgache puisqu’il est à Madagascar depuis trente ans et qu’il est marié à une malgache. Le directeur du service de santé, M.Baustrion, est également un civil ainsi que le chef du service des douanes, M. Deltel. Par ailleurs, dès que l’Amiral Miot a appris, à Tamatave, la prise de Vohemar, il a décidé d’envoyer deux missionnaires catholiques dans le nouveau territoire occupé par la France : ils seront chargés d’y installer une école. « Le commandant supérieur nous a indiqué au fond du village un vaste terrain planté de grands arbres, et il nous en a fait la concession pour la future école. Les chefs étaient présents ; ils approuvèrent ce choix » (Père Cros).

Les « richesses » de Vohemar

En France, la nouvelle colonie de Vohemar fait rêver. La Gazette géographique de 1885 en détaille les ressources – nombreuses d’après l’auteur de l’article : « Le port principal, dans le nord-est de Madagascar, au point de vue de la population et du commerce, est sans contredit la baie de Vohemar que nos troupes occupent depuis le 22 novembre dernier ». En effet, d’après l’article, la baie de Diego Suarez, elle aussi occupée « n’est pas un centre commercial ». Après avoir insisté sur l’excellent climat de Vohemar, l’article détaille les avantages de la région : « Vohemar occupe le centre du commerce qui se fait par voie de terre et par la voie de mer dans le nord-est de Madagascar ; tous les produits (caoutchouc, gomme copale, cire etc.) qui proviennent des villages de cette partie de la grande île, viennent de préférence sur le marché de cette province, où se trouvent, à part la Maison Française, les représentants de tous les commerçants indiens de Nossi-Be ». L’auteur donne ensuite, les ressources potentiellement exploitables, en dehors des produits de traite traditionnels dont il a parlé (caoutchouc, copal, cire) : d’abord, le cristal de roche dont on aurait trouvé « des blocs pesant près de 200 kg et mesurant 90 cm de long sur 60 de large, d’une limpidité parfaite, permettant de lire à travers » ; les bois de construction et d’ébénisterie : « l’ébène, l’acajou, le bois de rose, le bois de santal, les arbres à épices, le bois de cannelle » ; l’orseille « qui pousse à l’état sauvage » ainsi d’ailleurs que le coton ; le ricin ; le riz ; le cocotier ; le café « reconnu de très bonne qualité » ; la canne à sucre qui « pousse très bien à Vohemar » ; le sésame ; le tabac ; l’écaille de tortue... L’auteur de l’article souhaite qu’« aujourd’hui que cette province est occupée par nous, il serait à désirer que des industriels français vinssent s’y établir et fonder des usines qui donneraient d’excellents résultats ».
Bref, un vrai pays de cocagne.
Mais ce qui fait le plus rêver, dans la province de Vohemar, c’est l’abondance des bœufs qui « sont renommés comme les plus beaux de Madagascar » et que l’on trouve « en troupeaux considérables ». La qualité de ces bœufs et leur faible prix fait fantasmer les journaux français qui reprennent les informations données par Locamus, le fondateur de la conserverie d’Antongombato. Celui-ci évoque un prix de 4 sous (environ 75 centimes d’euro ou 2 600 ariary) pour diverses pièces de bœuf : un filet entier, une épaule ou une cuisse. La Gazette géographique parle, elle, de 52 à 55 francs ( environ 200 euros ou 700 000 Ar) pour le prix d’un bœuf entier. Aussi l’occupation française fait-elle affluer à Vohemar les commerçants, français, souvent venus de La Réunion, ou plus souvent indiens venus de Nosy Be. Pour favoriser le commerce, des crédits sont votés dès mars 1885 pour l’établissement d’une route entre Vohemar et Tamatave, et la vie sous l’occupation française s’organise à Vohemar.

La vie à Vohemar après 1885
Le général Digby Willoughby et son état-major
Le général Digby Willoughby et son état-major

Nous en avons une idée d’après les descriptions de François de Mahy qui fait escale dans le port en octobre 1885 (même s’il faut parfois se méfier de l’enthousiasme colonisateur de François de Mahy qui voyait en Madagascar une terre bénie pour les créoles réunionnais). Lorsqu’il arrive à Vohemar, le commandant Escande a été remplacé par le commandant Prouteaux qui offre l’hospitalité à De Mahy. Ses compagnons de voyage sont descendus chez M. Mathieu qui tient une « excellente auberge ». Mathieu est le représentant de la Maison Française (ancienne maison Roux de Fraissinet, de Marseille). Voici la description que fait François de Mahy de la petite ville : « Nous avons d’abord visité l’ambulance (l’hôpital) qui est parfaitement organisée[...]. Après l’ambulance, la douane dirigée par un de nos compatriotes Saint-Pierrois, un des fils de M. Casimir Deltel. Puis les magasins de l’Etat, le pavillon destiné aux médecins, le campement très bien ordonné de l’infanterie de marine, les boutiques de plusieurs marchands européens, indiens, créoles de Bourbon et de Maurice. Nous avons parcouru le village malgache sakalave, où nous avons dit bonjour au chef indigène, lequel rend aux Français les plus excellents services. Nous sommes entrés dans plusieurs cases. Depuis l’occupation, les mœurs des Sakalaves se transforment. La plupart ne couchent plus sur des nattes par terre ; ils ont des lits avec des moustiquaires, des chaises, de la vaisselle[...]. Nous avons ensuite fait visite à M.Guinet, puis à un créole de Saint-André[...] qui est parti de Bourbon avec sa femme, ses trois filles et son fils ». Après avoir décrit les français de Vohemar, François de Mahy s’extasie sur la ville et son brillant avenir : « Vohemar est une ville qui sort de terre et pousse comme un noble végétal dirigé par un horticulteur habile. Dans dix ans d’ici, ce sera un grand centre commercial[...]. Le port naturel de Vohemar est admirable. Les navires de grand tonnage y mouillent à toucher terre. En ce moment, sept beaux navires, dont cinq de commerce, y sont venus porter et prendre de la marchandise ». Mais malgré son enthousiasme, De Mahy redoute que « nos hommes d’Etat [...] n’étouffent dans son germe la colonie naissante ». Et, de fait, la domination française sur la région de Vohemar ne durera pas longtemps.
En effet, les troupes françaises de l’Amiral Miot n’ont pas les succès espérés, la résistance hova étant plus ferme que prévue et l’opinion française partagée sur l’idée d’un protectorat. L’Amiral Miot avait pu s’emparer de Tamatave et de Majunga, mais il dut se replier à Farafate où il se trouva confronté à plusieurs milliers de Hovas sous le commandement de l’anglais Willougby. Dans le combat les français eurent trois tués (dont le lieutenant Lubert dont un camp militaire de Diego Suarez porte le nom) et une trentaine de blessés. A la suite de ces opérations et alors que l’opinion française était lasse de ce conflit qui durait depuis deux ans, l’Amiral Miot fut sommé de reprendre les négociations, aidé par le nouveau Résident français à Madagascar, M.Patrimonio.

Le traité franco-hova de 1885

Les négociations commencèrent à Tamatave le 23 novembre 1885 entre Patrimonio et Miot d’une part et les représentants de la Reine : le gouverneur de Tamatave, Rainandriamampandry, le fils du Premier ministre Rainizamamanga et l’anglais Wilhougby. Le traité fut signé le 17 décembre 1885. Si le traité accordait aux français le droit d’occuper le territoire de Diego Suarez, et de recevoir une indemnité de guerre de 10 millions de francs (jusqu’au paiement de laquelle les troupes françaises occuperaient Tamatave), par contre, il reconnaissait à la Reine la souveraineté sur toute l’île, c’est à dire qu’il renonçait aux droits français sur les places conquises dans le Nord, notamment sur Vohemar qui fut évacué par les troupes à la suite du traité. Mais, les français continuèrent à percevoir les droits de douane sur les marchandises entrant à Vohemar, jusqu’au paiement complet de l’indemnité de guerre. Cependant, les différences d’interprétation sur les clauses du traité et de nombreux incidents amenèrent à une nouvelle guerre, celle qui allait aboutir à l’annexion de l’Ile par la France.

Vohemar après l’annexion de 1895
Vohemar, la rue des commérçants indiens
Vohemar, la rue des commérçants indiens

Un certain nombre de commerçants français ou indiens avaient rejoint Antsirane après que le territoire de Diego Suarez ait été cédé à la France. Les Merina reprirent le contrôle de Vohemar, à la grande colère de Mahy, d’autant plus que c’étaient des bateaux français qui avaient ramené les anciens occupants ! Mais le traité ne fut respecté ni par un parti ni par l’autre. Une successions d’incidents allaient amener à une nouvelle guerre, celle de 1895 qui vit l’annexion de Madagascar par la France.
Après 1895, gouvernée par un résident français, Vohemar continua à être le premier port exportateur de bœufs, vers Maurice et l’Afrique du Sud notamment. La revue du Mouvement social évoque le Vohemar de 1900 : « Vohémar (ou Yarana) dans les environs de Diégo-Suarez, est, dit-on, une petite ville proprette, aux rues bien alignées, coquettement assise aux bords d’une jolie baie. Elle compte environ deux cents cases. Chacune a sa petite cour, son enclos, ses cocotiers. Vohémar est un centre de commerce : c’est là que s’approvisionne une partie de la côte orientale ; c’est là qu’à certains jours se rassemblent les immenses troupeaux de boeufs de la province. On les embarque pour Maurice, pour La Réunion, pour le Transvaal. Les Anglais viennent y faire leurs provisions et payer 145 francs par tête des bœufs qui, avant la guerre, se vendaient à peine 60 francs ». De grands travaux sont envisagés pour faciliter le commerce : « [Gallieni] a prescrit la mise à l’étude de la construction d’un quai maritime et d’un wharf à Vohemar, de manière à faciliter l’embarquement des bœufs exportés ; le balisage de la rade a été décidé et le matériel nécessaire est déjà commandé en France ; des sondages ont été effectués en vue de la construction du quai. Le centre de Vohemar sera relié par une route carrossable à Diego-Suarez ».
Cependant peu à peu le port de Vohemar perdit de son importance. Les bœufs, qui représentaient la presque totalité des exportations, commencèrent à se vendre moins du fait de l’augmentation considérable de leur prix et les expéditions vers l’Afrique du sud cessèrent totalement en 1905. Une autre époque commençait qui verrait le port de Diego Suarez remplacer celui de Vohemar comme port principal du nord de Madagascar.

■ Suzanne Reutt


La longue histoire de Vohemar - 4ème partie : Vohemar, un des enjeux de la guerre de 1885

Envoyer

17 janvier 2015

La carte des opérations de Vohemar
La carte des opérations de Vohemar

La mort du roi Radama II avait signé le glas des espoirs commerciaux portés par la Charte Lambert, dont les intérêts étaient représentés par la Cie de Madagascar. Mais la France n’était pas disposée à renoncer à ce qu’elle estimait être « ses droits » sur Madagascar. La seconde partie du XIXème siècle allait être marquée par d’intenses (et conflictuels) échanges diplomatiques et par deux guerres opposant la France au gouvernement Hova. Dans la première guerre, celle de 1883-1885, Vohemar joua un rôle essentiel

Des « droits » français sur le Nord de Madagascar?

Depuis longtemps, la France revendiquait des droits sur le Nord de Madagascar: d’une part, ceux qui découlaient selon elle du traité franco-antankarana de 1841, signé avec la Reine Tsiomeko et qui plaçait les sakalaves du Nord sous la protection française et, d’autre part les avantages accordés par la Charte Lambert, signée par Radama II. Le contentieux de la charte Lambert avait été réglé par le versement d’une importante indemnité versée par la Reine Rasoherina mais les revendications françaises ne cessèrent pas malgré la signature d’un nouveau traité en 1868 qui reconnaissait l’autorité de la Reine sur toute l’Île. Le problème de la succession du Consul français Laborde fit rebondir les désaccords, envenimés par une série d’incidents dans le Nord. En effet, sur le conseil des Anglais, pression fut faite sur les chefs sakalaves qui avaient signé un traité avec la France, pour qu’ils se soumettent à la Reine. Le Premier Ministre Rainilaiarivony n’ayant donné aucune suite aux protestations françaises, le Contre-Amiral Le Timbre, commandant l’escadre française de l’Océan Indien partit de Tamatave pour faire enlever le pavillon de la Reine qui flottait sur les villages de la Grande-Terre en face de Nosy-Be. Les négociations franco-malgaches ayant échoué la France décida de bombarder quelques ports de la côte Nord-Ouest.

La guerre franco-hova 1883-1885 : les premières opérations

La guerre était inévitable. Le contre-amiral Pierre, nommé commandant en chef de la division navale de la Mer des Indes reçut les instructions suivantes : « Après avoir déclaré nettement aux Hovas que nous sommes résolus à mettre un terme à leurs tentatives pour s’imposer aux populations de la côte Nord-Ouest placées sous notre protectorat, vous ferez disparaître les postes qu’ils ont établis chez ces dernières [...]Si ces actions sont d’abord prévues sur la côte Nord-Ouest, une seconde série d’instructions ordonne à l’Amiral Pierre de "chasser les Hovas des territoires de la côte Nord-est placés sous notre protectorat" puis, après s’être emparé de Majunga d’envoyer un ultimatum à la Reine demandant notamment "la reconnaissance effective des droits de souveraineté que nous possédons sur la côte nord"». Le Premier Ministre ayant répondu négativement à cet ultimatum, l’Amiral Pierre bombarda Tamatave dont il s’empara le 11 juin 1883. Cependant, gravement malade, l’Amiral Pierre s’embarqua pour la France où il mourut, à son arrivée à Marseille le 16 août 1883. Il fut remplacé par l’Amiral Galiber, arrivé à Tamatave le 24 septembre. Les effectifs furent renforcés (l’Amiral Pierre ne disposait que de 800 soldats). On envoya à Madagascar une compagnie de fusiliers marins et 4 compagnies d’infanterie de marine furent dirigés sur La Réunion pour permettre la relève des troupes d’occupation. Par ailleurs La Réunion fut invitée à fournir 2 compagnies de volontaires créoles, tandis que l’on commençait à former des corps de sakalaves pour les utiliser comme auxiliaires. Enfin, l’escadre française fut renforcée.
L’Amiral Pierre avait disposé des bâtiments suivants : 2 croiseurs : la Flore et le Forfait qui devait rapidement être relevé par le Beautemps-Beaupré ; l’éclaireur d’escadre le Vaudreuil ; l’aviso de station le Boursaint ; la canonnière la Pique, avec en appui éventuel le transport-aviso la Nièvre. L’Amiral Galiber vit la division navale se compléter avec la canonnière Capricorne ; le transport-hôpital La Creuse ; le croiseur La Naïade remplaçant la Flore.

Les opérations sur la côte Nord-Est

Par une dépêche du 27 septembre l’Amiral Galiber reçut l’ordre de détruire les établissements hovas de la côte nord-est. Le Beautemps-Beaupré et le Boursaint ayant contourné l’Île par le sud « bombardent et incendient Manahar, Vohémar, Antombouc et Marancette (sic) » (Humbert ) entre le 26 octobre et le 16 novembre. Cependant, Galiber ne possédait pas les troupes suffisantes pour se maintenir dans les postes arrachés aux Hovas. Il avait d’ailleurs reçu l’ordre d’éviter toute complication en raison de nouvelles négociations entre l’Etat français et Madagascar, gouverné par une nouvelle reine en la personne de Ranavalona III qui avait succédé à Ranavalona II. L’Amiral Galiber rencontra à Tamatave les émissaires malgaches auxquels il déclara que « par suite de nos conventions de 1840 et 1841 avec les Sakalava, tout le nord de Madagascar, entre le Cap d’Ambre et le 16ème parallèle, était sous notre domination et que le gouvernement merina devait en retirer ses garnisons » (Grandidier).Ce à quoi le négociateur malgache Rainandriamampandry répliqua que c’était « comme si vous me demandiez un de mes bras ». Après l’échec des négociations, Galiber fut remplacé en mai 1884 par l’Amiral Miot.

Des navires français qui envahissaient Vohemar

Des navires français qui envahissaient Vohemar

Le débarquement de Vohemar

A la suite d’un vote français de la Chambre des Députés, en date du 27 mars, vote qui affirmait la résolution de la France de maintenir ses droits sur Madagascar, l’Amiral Miot reçut des instructions réclamant un maximum de fermeté. Cependant, les troupes merina qui occupaient les postes bombardés, s’étaient repliées dans l’intérieur : pour les atteindre, les bombardement de marine ne suffisaient pas. Miot demanda donc des renforts... qu’il n’obtint pas, la France étant engagée dans l’expédition du Tonkin. On lui envoya seulement un bataillon de fusiliers marins revenant d’Extrême-Orient, sous les ordres du capitaine de frégate Laguerre (!). Quant aux volontaires créoles de La Réunion, ils ne s’étaient pas bousculés pour s’engager, si l’on en croit le J.O de la République française du 5 août 1885 : « dans une note sur les effectifs que M. le Ministre de la marine a bien voulu fournir à la commission, nous voyons en effet que la Réunion, qui aurait dû fournir un effectif de 625 hommes, n’en a fourni en réalité que 270 ». Avec les forces dont il disposait, Miot embarqua le 17 novembre sur l’Allier, en direction de Vohemar, une compagnie d’infanterie de marine, une de fusiliers-marins, et dix gendarmes. Ces troupes furent mises sous le commandement du commandant Escande, qui venait de bombarder la ville avec le Beautemps-Baupré. La colonne de débarquement, sous les ordres du capitaine Bergeolle de l’infanterie de marine, s’empara de Vohemar.

La prise de Vohemar

Cette prise de Vohemar, les 20 et 21 novembre 1884, dont tous les journaux de France se firent abondamment l’écho, a donné lieu à de nombreux récits Voici, dans sa sécheresse, le télégramme du 6 décembre 1884, envoyé de Tamatave par l’Amiral Miot au Ministre de la marine : « Nos troupes occupent Vohemar ainsi que le fort Embaniou(sic). Les Hovas ont fui par le sud. Les Antankares ont très bien marché. Tous les chefs de la Province font leur soumission. N’avons ni tués ni blessés. Santé générale : satisfaisante ». Humbert donne un peu plus de précisions : « Le 21 novembre, après une reconnaissance préliminaire des lieux au cours de laquelle on avait infligé à l’ennemi un léger échec, le Beautemps-Beaupré, l’Allier et le Scorff débarquent à Vohemar un petit corps expéditionnaire :
- 100 hommes d’infanterie de marine;
- 240 fusiliers marins;
- 10 gendarmes à cheval;
- 300 porteurs antankaranes.
On enlève le jour même le village de la Douane, situé au fond de la baie, au pied du plateau de la Table. Puis les troupes s’établissent au bord d’un ruisseau d’eau vive dominé par cette hauteur ; en quatre à cinq jours, on transporte sur l’emplacement du bivouac les cases du village de la Douane et on crée ainsi le camp de Beautemps-Beaupré. Une ligne de sentinelles entoure le camp, de plus, un poste d’observation est installé au sommet de la Table, d’où l’on aperçoit, à 14 kilomètres dans le sud, le rova d’Amboanio.

La prise d’Amboanio

C’est dans ce fort d’Amboanio que se sont repliées les troupes merina. Voici le récit de la prise de ce fort que nous donne le journal XXème siècle. « Mais, l’opération la plus importante est celle qui a été exécutée avec le plus entier succès à Vohémar. On sait que le fort d’Amboanio, situé à 25 kilomètres de Vohémar, avait été occupé par une compagnie de marins fusiliers, une compagnie d’infanterie de marine et les compagnies de débarquement du Beautemps-Beaupré et de l’Allier. L’occupation s’était faite sans difficulté; on n’avait pas aperçu une tête de Hova. Les Antakares, enhardis par notre présence, parvenaient à enlever aux Hovas un troupeau de 500 bœufs qu’ils amenaient à la côte. Néanmoins, quelques jours après l’occupation, un parti de Hovas vint rôder autour du fort d’Amboanio et blessa un de nos hommes. L’amiral Miot, avisé de la présence de l’ennemi, résolut de lui infliger une leçon et de le déloger du fort de Menjaka-Tampo ou Andrianparani, à trente cinq kilomètres d’Amboanio. Il chargea le capitaine de frégate Escande, commandant le Beautemps-Beaupré, commandant supérieur de Vohemar, de diriger l’opération avec trois compagnies d’infanterie de marine, une compagnie de marins-fusiliers et un millier de Sakalaves du roi Tsialana venus de la côte nord-ouest pour reprendre possession des terres dont les Hovas les ont chassés ». La colonne se mit en marche le 5 décembre à une heure du matin. Voici le passage du rapport du commandant Escande qui rend compte de cette opération :
« Je rentre d’Amboanio avec la colonne expéditionnaire. Le fort a été pris, les Hovas ont tiré quelques coups de canon. L’ennemi, surpris par une marche de nuit très rapide et fort bien exécutée, n’a pas incendié le village, très considérable, qui est demeuré intact. Ils ont voulu détruire le fort très considérable, qui est demeuré intact. Leur frayeur était si grande que le temps a manqué. La maison du gouverneur, les cases de Ia garnison ont seules été détruites. J’ai pu sauver, avec peine il est vrai, la palissade. Deux jours de travail remettront en état ce fort, vraiment inexpugnable, quand il sera confié à la garde d’un détachement de Français et de 200 Antakares. J’ai décidé, à moins d’ordre contraire de votre part, amiral, que le fort d’Amboanio resterait occupé ; plusieurs raisons m’ont conduit à le faire. Une des colonnes avait tourné l’ouvrage et était arrivée à 7 ou 800 mètres du fort. Les Hovas, attaqués de tous les côtés, résistèrent avec bravoure, et ce n’est que quand ils se virent cernés de près qu’ils prirent la fuite. Ils laissaient 250 morts sur le terrain et le cadavre du gouverneur, un 12e Honneur ; on s’empara d’un matériel considérable.» L’Amiral Miot, rendant compte au Ministre de la Marine rendit hommage au courage du Gouverneur d’Amboanio: « Le chef hova s’est fait tuer bravement avec son fils Fondja ». Mais les Hovas possédaient encore une place forte à 35 km dans l’intérieur,à Andraparany: une expédition fut donc décidée contre ce fort.

La prise d’Andraprany

Ecoutons le rapport du capitaine Brun, qui, avec le capitaine Escande, commanda l’opération : « Le 5 décembre, époque de la pleine lune, à une heure du matin, la colonne expéditionnaire quittait Amboanio...». Elle comportait, en ordre de marche, la 5ème Compagnie de fusiliers marins ; la 21ème compagnie d’infanterie de marine ; le canon de débarquement du Beautemps-Beaupré et ses servants ; la compagnie de débarquement du Beautemps-Beaupré ; le contingent des auxiliaires antankarana avec le roi Tsialana à leur tête et enfin, les gendarmes. Il fut décidé de scinder la troupe en deux colonnes: une colonne de gauche comprenant 700 Antankarana et 73 fusiliers chargée de couper la retraite à l’ennemi sur la route de Sambava; une colonne de droite qui devait attaquer par le nord. D’après le capitaine Brun « le plateau d’Andraparany constitue une position militaire vraiment redoutable [...] A une heure, on commence l’escalade du plateau ». En fait, la colonne mettra 3 heures à atteindre le sommet après des escarmouches contre les troupes hovas. Arrivée sur le plateau d’où l’on distingue le fort d’Andraparany, la colonne se déploie en tirailleurs : c’est là que le combat va commencer : « Tout à coup, le feu de l’ennemi éclate [...]i l part d’un ravin encaissé. C’est là que les Hovas ont concentré leurs forces. Ils garnissent en grand nombre le bord situé de notre côté ; sur chacun de leurs flancs, deux pièces d’artillerie tirent sans relâche. La position est forte, l’attaquer de front serait une témérité ». Il est donc décidé de la déborder par la gauche pendant que le canon et un peloton d’infanterie mènent le combat de front. A 5 heures les adversaires ne sont plus qu’à 50m les uns des autres, « cette distance est franchie d’un bond au pas gymnastique » par les français et leurs alliés et les Hovas survivants doivent s’enfuir : «La victoire est complète, tous les chefs hovas sont restés sur le champ de bataille et,à côté d’eux, leurs meilleurs soldats ». Plus laconique, l’Amiral Miot envoya, le 11 décembre, le télégramme suivant au Ministre de la Marine : « Nous avons pris, le 6 décembre, le second fort au sud de Vohemar à la suite d’une marche de quinze heures faite par une colonne composée de 300 européens et de 900 Antankares. Nous avons perdu 5 canons ; 200 Hovas ont été tués sur les positions. De notre côté, nous avons eu 4 blessés, dont un grièvement ».
Les français étaient maîtres de Vohemar : qu’allaient-ils en faire ?
(à suivre)

■ Suzanne Reutt


La longue histoire de Vohemar - 3ème partie : La Compagnie de Madagascar à la conquête de Vohemar

Envoyer

1 janvier 2015

La grande rue de Vohemar à la fin du XIXème siècle
La grande rue de Vohemar à la fin du XIXème siècle

Nous avons vu que , dès le XVIIème siècle, la région de Vohemar et ses richesses-réelles ou supposées-ont aiguisé l’intérêt des traitants Français. Dès le début du XIXème siècle cet intérêt prend une tournure plus systématique avec les explorations méthodiques menées par la Compagnie de Madagascar

La Compagnie de Madagascar

Qu’était donc la Compagnie de Madagascar? Laissons parler son Gouverneur, le sénateur De Richemont qui publie en 1867 les Documents sur la Compagnie de Madagascar : « la Compagnie de Madagascar, autorisée par un décret impérial du 2 mai 1863, avait pour objet l’exploitation de la charte octroyée par le roi Radama à M.Lambert ». Cette « charte Lambert » dont nous avons déjà parlé dans ces colonnes, octroyaient d’immenses privilèges au traitant Lambert qui avait été fait « Duc d’Emyrne » (Imerina). Mais après l’assassinat de Radama, cette charte fut dénoncée par le nouveau gouvernement hova et la Compagnie fut dissoute. Elle avait cependant, pendant 3 ans, envoyé dans l’île de nombreuses missions commerciales. Dans le Nord, plusieurs agents de la Compagnie furent chargés de « battre le terrain » pour découvrir ce qui pouvait intéresser la Compagnie. Les consignes données par le baron de Richemont au chef de la section de Vohemar, l’ingénieur-chef Coignet, ne laissent aucun doute sur les principaux buts de ces explorations :
« Paris, le 16 mars 1863 [...]Vous avez à rechercher toutes les richesses métalliques ou minéralogiques que peut renfermer Madagascar, dans la partie comprise entre Diego Soarez(sic) et la baie d’Antongil.[...] Vous trouverez à Vohemar un Allemand, le docteur Guntz, que M. Lambert a chargé d’aller prendre possession de divers territoires. Cet Allemand aurait fait la découverte de plusieurs gisements métalliques.[...] On assure qu’un Anglais nommé John Leigh Study, a découvert des mines d’or sur le territoire de Vohemar. Il est à présumer qu’il n’aura donné à personne aucun renseignement précis sur cette découverte[...]. A cette occasion, je vous rappelle la prescription absolue ...de maintenir parfaitement secrètes les découvertes importantes que vous pourriez faire.»
Alors ? commerce ou espionnage économique ? Les deux sont liés comme on le verra dans les rapports des agents de la Compagnie opérant dans le Nord. Un des premiers rapports que recevra la Compagnie à propos de Vohemar est celui du Dr Guinet, le 15 juillet 1863. Après avoir décrit le port de Vohemar, Guinet signale que 3 villages coexistent à Vohemar : « le village qui s’aperçoit aussitôt qu’on a doublé la pointe se continue jusque de l’autre côté du banc de sable dont j’ai parlé plus haut; il paraît divisé en trois parties : 1° le village des blancs, à l’est ; 2° celui des sakalaves Betsimisaraks ; 3° celui des hovas, remarquable par un rond de cocotiers très élevés ; c’est le plus ouest. Lors de mon arrivée à Vohemar, l’ancien village des blancs n’était habité que par leurs ex-ménagères et serviteurs. Cet endroit se reconnaît encore par les restes des plantations d’arbres fruitiers qu’y ont faites leurs anciens possesseurs. C’est sur ce point que pourront être établies les maisons de commerce. Nous avons pris possession de tout le village.[...] Cet endroit est très propice pour y établir un grand village, situé devant le port, borné au nord par la mer, au sud et à l’ouest par un marais de palétuviers, et à l’est par une partie boisée où sont les cimetières sakalaves ».
Après avoir décrit les problèmes d’installation (notamment la recherche d’une eau potable), Guinet passe aux « choses sérieuses »: « Aux environs de la montagne de la Table, on rencontre des agates, et, en continuant à suivre la chaîne dont elle fait partie au sud, on est étonné de la quantité de minerai de fer qu’on y rencontre. J’ai pu voir des échantillons de ce minerai contenant au moins 80% de métal. Nous avons cru aussi y trouver du plomb; mais n’ayant aucun moyen d’analyse, il a été impossible de s’en assurer. Les indigènes prétendent que dans le nord de Madagascar il existe des mines d’argent. Je n’ai rien vu qui put me prouver l’existence de ce fait ».
Si, de toute évidence, les agents de la Compagnie ont pour consigne de découvrir des ressources minières, ils ne se désintéressent pas pour autant des possibilités d’exploitation agricole et forestière. Dans son rapport du 23 mars 1864, Guinet rêve sur ce que « l’agriculteur le plus entreprenant trouverait dans ces terrains [...]; le coton, le tabac, le sésame, l’indigo, le bananier, etc., etc., y viennent presque sans culture. Les indigènes habituellement se contentent de sarcler leur riz une seule fois ; les cannes à sucre, plantées sans aucun soin, y viennent presque sans que leurs cultivateurs s’en occupent, et néanmoins atteignent des dimensions considérables : les arbres à fruits, manguiers, cocotiers et autres y sont de la plus grande beauté : en un mot, tout ce qu’on plante dans ces terrains y vient comme par enchantement.»
Pays de cocagne que, cette région de Vohemar, sans parler (mais Guinet en parle !) de la gomme copal que l’on y récolte, de l’écaille de tortue que ramènent les pêcheurs, des pierres précieuses peut-être dissimulées dans ces terrains en friche... Un rêve de commerçant ! Mais avant de pouvoir exploiter ces richesses, il faut vaincre de nombreux obstacles...

Joseph-François Lambert 1824 - 1873

Joseph-François Lambert 1824 - 1873

Joseph-François Lambert 1824 - 1873

Aventurier français fondateur de la Compagnie financière, industrielle et commerciale de Madagascar, il est nommé Duc d'Emyrne (Imerina) par le roi Radama II avec lequel il a élaboré la « Charte Lambert » avant l'accession au trône de ce dernier, quand il n'était que le Prince Rakoto. Cette « Charte Lambert », signée le 28 juin 1855, attribuait à Lambert le droit exclusif d'exploiter tous les minéraux, les forêts et les terres inoccupées de Madagascar en échange d'une redevance de 10 pour cent à l'ordre de la monarchie Merina. Dans les années qui suivront, les Français utiliseront cette "Charte Lambert" et une lettre du prince Rakoto à Napoléon III demandant la protection française pour justifier la guerre franco-hova et l'annexion de Madagascar en tant que colonie.

Les difficultés d’installation

Si Guinet, et son homologue, le Dr Gunst rappellent les excellentes conditions sanitaires qu’offre le climat de la région, ils insistent sur les problèmes que poserait l’installation d’une maison de commerce à Vohemar.
Le premier obstacle, c’est, bien sûr, le manque de routes : « Un voyage de Vohemar à Antsingy (le fort Hova d’Ambohimarina, à Diego Suarez) et au Cap d’Ambre, par terre, est toujours très pénible et très fatigant sous tous les rapports. Dans la saison des pluies[...] tout voyage est presque impossible ».
Autre obstacle, le manque de main d’œuvre : non seulement la région est peu peuplée (Guinet donne, pour la Province de Vohemar, les chiffres de population suivants : Betsimisaracks : 3 à 400, Sakalaves :5 à 600, Hovas : 100 à 150) mais, de plus, les malgaches « ne veulent pas travailler à gages », c’est à dire contre rémunération.
Enfin, dernier mais principal problème, la région est gouvernée par les Hovas qui voient d’un mauvais œil l’installation des traitants français : « Dans ces contrées lointaines, les Hovas en général imposent leur nationalité ; ce seul titre leur constitue le droit qu’ils s’arrogent de conserver en tout le monopole le plus positif sur toutes les affaires commerciales. Malheur au traitant qui, se fiant dans la foi des traités et des ordres de la Reine, voudrait faire un commerce quelconque sans en passer par où les Hovas voudront le faire passer ; il peut être sûr de voir toutes ses marchandises rester en magasin et les acheteurs indigènes s’éloigner de lui comme s’il avait la peste. Pourquoi ? C’est que le Commandant et son conseil ont défendu à tous de ne rien vendre et de ne rien acheter chez celui qui a été mis à l’index ! et tous savent parfaitement que le contrevenant serait certainement puni ».

Les visées lointaines de la Compagnie de Madagascar

Les Hovas qui gouvernent le Nord de Madagascar ont-ils des raisons de se méfier des explorations des agents de la Compagnie ?
En fait, il semble que les visées de la Compagnie de Madagascar étaient moins innocemment commerciales que ce que le disaient le baron de Richemont et ses agents.

Que l’on en juge...

Guinet, décrivant la route qui mène de Vohemar au fort merina d’Amboanio suggère : « Pour le passage d’une colonne de troupe, je proposerais une petite modification : au lieu de traverser le marais de palétuviers à la sortie du village, il faudrait, avec vingt hommes, dont dix armés de haches, suivre le bord du marais en passant par un sentier qui existe déjà entre la petite forêt qui borde la côte et ledit marais...». Suit une description topographique qui se termine par cette phrase : « Je crois qu’en suivant la crête de ce mamelon, on pourrait pénétrer jusque dans le fort hova sans avoir à redouter les projectiles ».Des propos bien guerriers pour un honnête négociant...
D’autant plus que le rapport de Guinet contient un chapitre « Renseignements militaires » qui ne laisse aucun doute sur les visées de conquête dissimulées sous les explorations commerciales. Dans ce chapitre, Guinet évoque la suprématie des hovas : « La force des Hovas est réellement considérable dans toute la partie nord de Madagascar. En effet, l’effectif des soldats et officiers se monte à 180 hommes, pour la province de Vohemar, répartis comme suit : Maramila (soldats): 80, Manamboniatra (officiers): 100 ». Chiffres qu’il met en balance avec les 480 hommes valides que comprend la population de la province et qu’il pense voir se rallier aux européens en cas d’attaque victorieuse de ceux-ci contre les hovas.

Le fort de Vohemar

Poursuivant son rôle occulte d’espion, Guinet décrit en détail le fort de Vohemar. « Le fort de Vohemar est de forme carrée, entouré d’une quadruple enceinte, dont trois en pieux et une en haies de raquettes[...]. L’enceinte qui suit les raquettes est formée de pieux espacés les uns des autres d’environ 2 mètres ; ils sont reliés par des traverses à la façon des parcs à bœufs. Cette première enceinte est donc complètement libre et peut avoir de 30 à 40 m de façade. Celle qui suit constitue alors la véritable enceinte ; elle est formée de piquets de 3 m de haut, solidement fichés en terre et reliés entre eux par des traverses logées dans le milieu des bois qui sont tous à se toucher. Il y a trois portes principales, une au nord, l’autre au sud et la troisième à l’est. Les angles et le milieu des faces du carré sont défendus par des constructions également en palissades et établies sur trois côtés ; ceux qui se trouvent près des portes forment une petite saillie extérieurement ; celles des angles sont élevées par un terre-plein jusqu’à la hauteur de l’entourage, de façon à ce que l’artillerie qui y est renfermée domine les murailles. Toutes ces constructions, qui sont au nombre de huit, renferment des canons en fonte pour la plupart hors de service ; dans tout ce que j’ai vu, il n’y a pas plus de cinq pièces en état de faire feu à poudre ; ce sont des pièces de 4 et 8.[...] Tout autour de l’enceinte intérieure dont je viens de parler, règne un chemin de ronde d’environ 8 m de large. C’est à l’ouest - nord-ouest de cette enceinte que se trouve la poudrière qui renferme à peu près 4 à 500 kilogrammes de poudre pour cartouches et gargousses. Entre l’enceinte dont je viens de parler et la dernière , qui est celle où demeure le commandant, il y a encore un petit chemin de ronde ; la largeur totale de cette enceinte peut être d’environ 25 à 30 mètres.»

Radama II, Roi de Madagascar du 16 août 1861 au 12 mai 1863

Radama II, Roi de Madagascar du 16 août 1861 au 12 mai 1863

Après avoir décrit la demeure du commandant où sont renfermées les archives de la province, Guinet évoque les abords du fort : « Le fort est protégé au nord par la rivière de Manambery qui en est éloignée d’environ 3 milles; au sud-ouest par la rivière de fanamba située également à 2 ou 3 milles; au sud-ouest par un ruisseau qui prend naissance dans la vallée, au pied du fort, et va se jeter dans la rivière de Fanamba. Enfin, à l’est, il a les hautes dunes qui bordent le rivage de la mer.»
L’ingénieur-commerçant Guinet se transforme ensuite en stratège pour expliquer comment parvenir rapidement au fort en cas d’attaque, citadelle qui, d’après lui, ne pourrait pas « tenir deux heures à une attaque de troupes européennes » qui pourraient incendier le fort bien que les Hovas aient pratiqué « sous le chemin est, dans la deuxième enceinte, une excavation pour abriter la garnison en cas d’incendie ».
Toutes ces précisions laissent peu de doutes sur les intentions de conquête de la Compagnie de Madagascar...qui ne pourra pas les mettre à exécution. Le roi Radama, protecteur de Lambert, ayant été assassiné, les conditions politiques d’une conquête du Nord de Madagascar se trouvaient réduites à néant. L’Empereur français, Napoléon III « invita la Compagnie à abandonner son œuvre, s’engageant à la faire indemniser par les Malgaches des dépenses qu’elle avait faites. Cette indemnité ayant été payée au mois de janvier 1866, l’Assemblée Générale des actionnaires prononça la dissolution de la Société le 26 mars suivant » (Baron de Richemont).
La Compagnie de Madagascar n’avait existé que pendant 3 ans : elle n’avait pu voir aboutir ses projets commerciaux, et peut-être des projets plus politiques mais, comme De Richemont l’exprimait dans son rapport du 26 mars 1866 « D’autres, peut-être, mieux servis par les circonstances, reprendront après nous l’œuvre que nous sommes contraints d’abandonner, et la trace de nos efforts ne serait perdue ni pour eux, ni pour le pays ». Effectivement, moins de 20 années plus tard, le Nord de Madagascar serait à nouveau un enjeu dans les relations franco-malgaches, et Vohemar jouerait un rôle essentiel dans le conflit qui se préparait.
(à suivre)

■ Suzanne Reutt


Page 3 sur 3

Traduction

aa
 

Visiteurs

mod_vvisit_countermod_vvisit_countermod_vvisit_countermod_vvisit_countermod_vvisit_countermod_vvisit_countermod_vvisit_countermod_vvisit_counter
mod_vvisit_counterAujourd'hui3566
mod_vvisit_counterHier2383
mod_vvisit_counterCette semaine5949
mod_vvisit_counterSemaine dernière21196
mod_vvisit_counterCe mois68211
mod_vvisit_counterMois dernier347580
mod_vvisit_counterDepuis le 11/11/0919807640

Qui est en ligne ?

Nous avons 2178 invités en ligne

Statistiques

Membres : 17
Contenu : 14344
Affiche le nombre de clics des articles : 42379702
You are here PRESSE MADAGASCAR La Tribune de Diego 2015