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Conte de Noël

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La Plume et le Képi

Publié le 8 décembre 2016 par Veilleurs

Noël dans les Tranchées par Louis Perez Y Cid

Noël dans les Tranchées par Louis Perez Y Cid

« Noël dans les tranchées »

 

« Hier  on a fait, au-delà de notre tranchée, l’attaque la plus fulgurante que nous puissions imaginer. Cela s’est fait de nuit, par surprise, dans des conditions de hardiesse  incroyables; les armes des groupes ennemis que nous pensions irréductibles leurs sont tombées des mains. Trouvé terré au fond d’une tranchée, un des chefs a été amené captif. C’était la fin de l’opération, les hommes le sentaient, nous pouvions rejoindre nos tranchées. Une autre compagnie de Légion passait triomphale à nos côtés, nous leur crions: « Salut les copains », deux cents bouches répondaient, d’une seule voix: “bonjour camarades”, tout vibrait autour de nous, nous avions conscience de vivre des heures inoubliables. En retournant vers nos tranchées, l’éclatement d’un obus foudroya un légionnaire en plein élan, son grand corps tournoya sur lui-même avant de retomber dans les profondeurs de la terre. Il nous fallait rester vigilants en espérant ne pas être les prochaines victimes de ces bombardements aveugles.

L’état du terrain ne nous permettait pas de courir nous mettre aux abris, une sorte de nonchalance fataliste s’emparait de nous ; notre prisonnier lui, se laissait guider et ne disait mot. Nous étions la veille de Noël, on voyait au loin de gros nuages se dessiner menaçants et la blanche descente des flocons commença. En une nuit, toute la plaine fut ensevelie. Plus aucun bruit ne traversait la campagne immobile. Seuls des corbeaux, par bandes, décrivaient de longues guirlandes noires dans le ciel immaculé, cherchant leur pitance, s’abattant tous ensemble sur les champs livides et piquant la neige de leurs grands becs.

L’ambiance dans notre tranchée-refuge était marquée par le comportement incontrôlable de notre prisonnier  qui commença par planter sur nous des yeux fixes, hagards, pour ensuite lever les bras, les tordre et se convulser de la tête aux pieds, rouler par terre en poussant des cris horribles. Toute la nuit, il se débattit en spasmes épouvantables, secoué de tremblements. Nous étions impuissants à le tenir, au point de devoir le lier. Il hurlait sans repos s’exprimant en français d’une voix infatigable. Le pauvre homme était devenu fou et aucun choix ne se présentait à nous que celui de devoir le supporter jusqu’à ce que l’ordre soit donné de le rapatrier vers l’arrière.

Malgré ce fond sonore perturbant, la vie continuait, une étrange et insolite trêve semblait s’être installée, nous étions le jour de Noël, les canons se taisaient et aucun obus ne venait perturber la pâle désolation des champs de bataille.

Quelques légionnaires s’employèrent, tradition oblige, à confectionner une crèche avec les moyens disponibles et les nombreux débris qui jonchaient le sol.

Hans, ainsi se prénommait notre prisonnier, en contemplant la crèche était encore secoué de terribles tremblements, criait toujours, mais d’une voix moins déchirante. On eût dit qu’il ne pouvait baisser les yeux, qu’il était rivé, fasciné, son corps raidi semblait s’amollir. Soudain, il s’était tu  et avec un calme impressionnant, inattendu et bienvenu, il s’adressa à nous en ces termes: « Frères soldats, je vous demande humblement pardon pour mes exubérances involontaires, je ne savais me contrôler, j’ai heureusement la chance de connaître votre langue et de pouvoir ainsi vous exprimer ma reconnaissance de m’avoir laissé la vie sauve. J’ai bien cru devenir fou de terreur, de véritables diables sont tombés sur nous et  je pense que l’enfer doit  ressembler à ce déferlement de violence qui a fait disparaître, dans des conditions cruelles et atroces, mes frères d’armes, mes chers et pauvres compagnons. Ma raison a vacillé dans une sorte de démence, ma souffrance était bien au-delà de ce que je ne pouvais supporter. C’est la vue de votre crèche qui me fait revenir de l’enfer dans lequel je m’étais muré. Elle  me projette miraculeusement dans le monde magique de mon enfance où je me revois entouré de mes frères et sœurs sous les regards bienveillants de mes parents. Jamais je ne pourrai oublier cette magnifique représentation que vous avez faite de cet enfant nu, sans défense, emmailloté dans une mangeoire misérable; cette scène insolite en ces lieux restera, pour moi, une révélation et me fait comprendre combien nous sommes semblables. J’avais entendu parler de la réputation de la Légion et je ne donnais pas cher de ma peau au cas où je me retrouverais entre vos mains. Je ne pouvais m’imaginer que vous étiez aussi et surtout des hommes de chair, d’os et de sang avec votre propre sensibilité. Votre crèche est révélatrice de votre humanité, elle redonne un sens à ma vie et un puissant besoin de vivre avec l’espoir de voir naître un monde de paix où la guerre n’aurait plus de raison d’être et où ne s’affronteraient plus les hommes de bonne volonté. N’est-il point vrai que si l’on ne peut rendre les choses heureuses, on peut les rendre moins malheureuses…

Gardez fidèlement cette magnifique tradition encore longtemps, que des hommes comme vous, en ces temps de guerre, puissent prendre le temps de venir s’incliner devant ce nouveau-né est réconfortant et tout à votre honneur.

Joyeux Noël kameraden ».

 

Christian Morisot.


Traduction

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