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Général Autran : « le Génie est une caisse à outils ! »

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Secret défense

Samedi 23 Juin 2012

Un entretien avec le général Francis Autran, commandant de l'Ecole du Génie.

Le général Francis Autran commande l’école du génie. Montagnard et sapeur, ancien chef de corps du 2e REG, il a également commandé la 7e brigade blindée. Pour Secret-Défense, il fait le point sur son Arme. Avec cet entretien, nous poursuivons notre tour d'hoziron de l'armée de terre d'aujourd'hui, après la Brigade des forces spéciales Terre, la Légion étrangère et l'Aviation légère de l'armée de terre.

Le Génie, c’était à la fois une Arme et un Service. Est-ce toujours le cas ?
Non, le Service du Génie n’existe plus depuis 2005, date à laquelle le service d’infrastructure de la Défense (SID) a été créé en regroupant les compétences des trois armées en matière d’infrastructure. Le SID relève du Secrétariat général pour l’administration (SGA) au sein du ministère de la défense. Aujourd’hui, le génie est donc toujours une Arme, mais qui repose sur deux grands piliers : le combat et la sécurité. Il faut noter que plus de la moitié des effectifs de notre Arme – environ 16 000 hommes et femmes – servent au sein de la brigade de sapeurs-pompiers de Paris et des trois unités d’instruction et d’intervention de la sécurité civile. Ils sont militaires, mais dépendent, pour emploi, de la préfecture de police de Paris pour les uns et du ministère de l’Intérieur pour les autres.

Que représente le génie dans l’armée de Terre ?
Et dans l’armée de l’Air, pourriez-vous ajouter, car l’un de nos régiments – le 25e régiment du génie de l’air d’Istres – sert au sein de l’armée de l’Air, qui le paye et l’équipe même si son personnel est « terrien ». Le 25e RGA est un régiment d’aide au déploiement lourd spécialisé dans la réalisation et l’entretien de plates-formes aéroportuaires et l’aide au déploiement lourd : sa spécialité, unique en France, est de construire et réparer des pistes d’aviation.

Dans l’armée de Terre, le génie est aujourd’hui constitué de huit régiments (un par brigade interarmes) et de l’école à Angers. A la suite des décisions prises en 2008-2009, nous avons dissous la brigade du génie et trois régiments : les 1er, 2e et 5e RG. En réduisant les effectifs, nous avons cependant veillé à ne perdre aucunes compétences, même si certaines sont très réduites. Le génie est une sorte de caisse à outils et tous les outils sont nécessaires pour un appui cohérent. Tous nos régiments sont à la fois polyvalents et spécialisés. Je m’explique ! Ils comportent tous un même cœur de compétences, mais chacun d’eux accueille des capacités spécialisées. Au bilan, on peut fournir un appui complet sur tout le spectre possible des engagements, en opération extérieure comme sur le territoire national, avec une forte réactivité.

Quels sont donc ces huit régiments ?
Outre le 25e RGA, dont nous avons parlé, il y a le 1er et le 2e REG, régiment étranger DE génie et non DU Génie, comme le veut l’appellation traditionnelle dans la Légion. Puis le 3e RG, le plus ancien, dont on fêtera le bicentenaire en 2014, le 6e RG, le 13e RG, le 17e RGP, le 19e RG et le 31e RG. Ce sont des régiments de taille variable, de 800 à 1200 hommes – et chacun est rattaché à une brigade interarmes. Tous possèdent trois compagnies de génie-combat et une compagnie d’appui qui regroupe les capacités d’organisation du terrain, d’aide au déploiement d’urgence, de production d’eau, etc. ; certains possèdent également des unités d’appuis spécialisés.

Pouvez-vous les décrire ?
Le 1er REG (Laudun) appartient à la 6e brigade légère blindée. Il détient des capacités spécifiques pour l’appui d’une opération amphibie.
Le 2e REG (Saint-Christol) est le régiment de la 27e brigade d’infanterie de montagne, spécialisé dans l’appui au combat en zone montagneuse et d’accès difficiles, par des conditions climatiques extrêmes.
Le 3e RG (Charleville-Mézières), au sein de la 1e brigade mécanisée, a récupéré les moyens lourds de franchissement du 1er RG à sa dissolution, notamment 100 mètres de pont flottant motorisé. Ces matériels sont tous les hivers en alerte en cas de crues majeures sur le territoire national par exemple. Lancer un pont est un métier de sapeur, même si à l’origine, cette compétence de pontonnier était détenue par l’artillerie, comme lors du franchissement héroïque de la Bérézina il y a deux cents ans cette année. Il convient de noter qu’en Europe 80% des coupures humides font moins de 20 m, mais que l’on trouve en moyenne une coupure de 100 m tous les 100 kilomètres. Cette capacité à franchir a donc toujours un véritable intérêt opérationnel.
Le 6e RG (Angers) est rattaché à la 9e Brigade légère blindée d’infanterie de marine. Ce régiment est spécialisé, comme le 1er REG, dans l’appui des opérations amphibies. Il possède également des moyens de franchissement lourd (EFA), ainsi qu’une compagnie d’aide au déploiement opérationnel et une compagnie énergie (production et distribution).
Le 13e RG (Valdahon), les « sapeurs de Leclerc » de la 2e brigade blindée, accueille la compagnie de contre-minage, les spécialistes de l’ouverture d’itinéraires piégés, avec des matériels spécifiques comme le Buffalo, le Madez ou le Souvim. Le 13e RG perçoit également le nouveau système de pose rapide de travures (SPRAT) qui permet un franchissement tactique de 24 m.
Le 17e RGP (Montauban) est le régiment d’appui de la 11e brigade parachutiste. Il possède des savoir-faire spécifiques en matière de reconnaissance de zone de poser et de réalisations de terrains sommaires.
Le 19e RG (Besançon), au sein de la 7e brigade blindée, a intégré deux compagnies d’aide au déploiement lourd de l’ancien 5e RG, à Canjuers et Mourmelon, ainsi que la compétence spécifique voie ferrée. Il possède également des moyens de franchissement lourd (EFA).
Enfin, le 31e RG (Castelsarrasin) est le régiment d’appui de la 3e brigade mécanisée. Il a, comme le 6e RG, une compagnie d’aide au déploiement opérationnel (qui regroupe tous les corps de métier du bâtiment) et une compagnie énergie.

Pour le Génie, les années 80 et 90 avaient été celles du déminage humanitaire (Cambodge, Bosnie, Koweit, Liban, etc), l’Afghanistan a changé la donne, avec deux nouvelles missions : l’ouverture d’itinéraires piégés et la fortification. Partagez vous ce point de vue ?
Je préfère le terme plus générique de déminage classique, qui bien sûr peut être à but humanitaire. Oui, même si l’on fait encore du déminage classique au Liban et que l’ouverture d’itinéraires piégés par ce qu’on appelait alors les Road Side Bombs, au Liban justement, ne date pas d’aujourd’hui. Mais il est exact que la menace des engins explosifs improvisés (EEI) a été un vrai défi pour nous. Nous avons étroitement travaillé avec nos alliés, notamment américains et britanniques, et l’Otan a développé un concept de lutte contre les EEI (Counter-Improvised Explosive Device – C-IED) que nous nous sommes approprié. En outre, un pôle interarmées pour le traitement du danger relatif aux munitions et engins explosifs (PIAM) a été créé à Angers à l’été 2011, en regroupant les compétences de l’Echelon central Nedex de Villacoublay et du centre C-IED de l’école du génie.
Même si l’engagement en Afghanistan touche à sa fin, nous estimons que cette menace fait désormais partie du paysage des opérations de façon pérenne. Nous ne devons pas perdre nos compétences très spécifiques en la matière – compétences chèrement acquises et d’abord au plan humain.

Qu’en est-il de la fortification ?
C’est un vieux métier de sapeur ! En Afghanistan par exemple, nous avons réappris l’aménagement du terrain en zone de combat pour assurer la meilleure protection possible des forces. En fait, l’aménagement du terrain sert aussi à tenir le terrain dans une zone d’opérations. Dans ce domaine, les choses ont beaucoup évolué. Au début des interventions en ex-Yougoslavie, nous maillions la zone d’action avec des installations plus ou moins sommaires disséminées sur le terrain, puis nous avons développé le concept du « camp 1000 hommes », comme celui de Novo Selo au Kosovo, qui correspond en fait au camp romain, si je peux prendre cette image. En Afghanistan, nous redécouvrons, avec des techniques et des technologies nouvelles, la base fortifiée. Qu’est-ce que la FOB (Forward Operational Base) Surobi, sinon un château fort sur un piton arasé et entouré par tout un dispositif de protection passive et active ? Les COP (Combat Out Post) sont quant à eux des postes avancés, à la fois vigies, comme l’étaient, par exemple, les tours génoises, et bases de combat qui permettent de tenir les points clés du terrain.

Où en est le Génie dans le renouvellement de son matériel, toujours très particulier ?
L’arme du génie est en cours de modernisation et de renouvellement d’une partie de ses équipements. Notre emblématique MPG (Moyen polyvalent du génie) arrive en fin de vie cette année après des services exceptionnels ! Deux équipements d’organisation du terrain plus modernes et aux performances différentes du MPG sont entrés en service ces dernières années : le tracto-pelle EGRAP (engin génie rapide de protection) et le bouteur à roues EGAME (engin du génie d’aménagement du terrain). Les unités sont en train de se les approprier. Les systèmes de pose rapide de travure (SPRAT) sont en cours de livraison : il y en aura 10 au total. Nous avons acheté des Buffalos aux Américains et perçu une dizaine de véhicule blindé hautement protégé (Aravis), pour équiper le détachement d’ouverture d’itinéraire piégé qui est actuellement déployé en Afghanistan. Mais il n’y a pas que les véhicules. Nous avons de nouveaux ateliers de campagnes pour l’aide au déploiement d’urgence et opérationnelle, pré-conditionnés dans des containers, qui fournissent l’outillage à tous les corps de métier. Ou toute une série d’équipements spécifiques à l’appui au combat en zone urbaine, comme des lots d’investigation verticale par exemple. Enfin, nos engins blindés du génie (EBG) – une version de l’AMX30- sont en cours de revalorisation et commencent à être livré dans les régiments. C’est le seul engin de combat du génie qui nous permet d’appuyer une unité de mêlée au contact et sous le feu.

Y-a-t-il encore des lance-flammes et des poseurs de mine ?
Non, il y a bien longtemps que le lance-flamme a été abandonné et n’est plus en service dans l’arme du génie. Quant aux mines, nous n’avons plus de mines antipersonnel, en respect des conventions internationales que la France a signées. Nous avons en revanche conservé un système mécanique de pose de mines, le Minotaur, mais uniquement à base de mines antichars programmables.

Un dernier mot sur l’école – qui ne s’appelle plus l’école supérieure et d’application du génie…
C’est maintenant tout simplement l’école du génie, à Angers. 400 permanents y servent et ils forment 3600 stagiaires par an (militaires et civils), provenant des trois armées, du SID et de la gendarmerie.

Photo (Courier de l'Ouest)
Jean-Dominique Merchet

Traduction

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