Publié le 15/11/2001
Le 4e RE fêtera, dès ce week-end, ses vingt-cinq ans de présence en Lauragais, à l'occasion de son quatre-vingt-unième anniversaire. Après des débuts mouvementés et une arrivée contestée, le régiment a su se faire accepter, apportant une grande richesse à la ville. Désormais, le « 4 » fait partie intégrante du paysage lauragais: « On vit ensemble, pas côte à côte », souligne un Chaurien de souche.
A l'automne 76, des slogans fleurissent sur les murs de la ville: « Non à la Légion ». A quelques mois des élections municipales de mars 1977, au lendemain de l'élection du socialiste Henry Dofny sur le canton-sud de Castelnaudary, la question de l'arrivée des « képis blancs » en Lauragais prend rapidement un tour politique. Certes, la dissolution du 1er Régiment étranger, basé à Corte, s'est faite dans des conditions plus que sulfureuses. Et les baroudeurs de la Légion dont on annonce la venue sont précédés d'une réputation certes flatteuse du point de vue militaire, mais nourrie aussi de fantasmes et du goût de cette arme pour le mystère. Jean-Louis Siffre, enseignant à la retraite du lycée Jean-Durand, aujourd'hui maire de Rodome et conseiller général de Belcaire, alors conseiller municipal de Castelnaudary, se souvient parfaitement de ces heures tendues.
DE VIOLENTES ATTAQUES
« Le député-maire, Jean-Pierre Cassabel, s'est retrouve très isolé face à des attaques extrêmement violentes, relate-t-il. Mais il a été solide et il pouvait compter sur le soutien unanime de son conseil municipal. Une quarantaine de villes, dont des villes plus importantes que Castelnaudary, comme Marseille ou Cahors, étaient sur les rangs pour accueillir la Légion. Jean-Pierre Cassabel a su arracher la décision. Je suis très fier d'avoir fait partie de cette équipe ».
Atouts de la capitale du Lauragais: la caserne Lapasset, alors quasi inoccupée; des perspectives d'extension, déjà, du côté des Cheminières; de vastes champs de manoeuvre à proximité, notamment dans la Montagne Noire. Et aussi « les amitiés politiques parisiennes sur lesquelles Jean-Pierre Cassabel pouvait compter », souligne Jean- Louis Siffre. Castelnaudary, très ancienne ville de garnison - depuis avril 1876, avec l'installation du 15e Régiment d'infanterie à la caserne Lapasset toute neuve- renoue donc avec la tradition le 23 novembre 1976, avec l'implantation du groupement d'instruction de la Légion Etrangère (GILE), aux ordres du chef de bataillon Estay. Un siècle après exactement!
ACCUEILLIS AVEC CHALEUR
Très rapidement, la population accueille avec chaleur les nouveaux venus: « Lors de leur premier défilé en ville, il y avait 5.000 à 7.000 spectateurs pour les applaudir », se souvient un ancien. « Tout le monde les craignait, admet Jean- Louis Siffre, mais les événements de Corte ont finalement rendu service à la Légion. Tout a été parfaitement encadré »...
Le régiment et ses cadres savent s'intégrer. Et rendre aussi de fiers services. Lors des tempêtes de l'année 81, les légionnaires remettent en état le cimetière de Saint- Papoul, déblaient le haut de la ville enneigé... Ils seront sur le front également lors des terribles inondations qui ont frappé la haute vallée de l'Aude, puis l'est du département, il y a deux ans. Ils sont de toutes les manifestations, en ville et dans les villages, fournissant des piquets d'honneur à chaque commémoration. Des liens d'amitiés se créent. Sans compter le poids économique et démographique de ce fort régiment. Dont le Lauragais aurait du mal à se passer. Vingt-cinq ans après, la seule crainte, ce serait le départ de la Légion.
Laurent GAUTHEY.
Une manne économique
Sur le plan économique, les chiffres parlent. En 1998, les dépenses du « 4 » s'élevaient à environ 60 millions de francs (9,146 millions d'euros) sur Castelnaudary: 3,5 millions (533.571+E) de budget de fonctionnement, 11 millions (1,676 million d'euros) provenant des soldes des engagés volontaires, 1,3 million ((198.183+E) du cercle et 40 millions de francs (6,1 million d'euros)des familles implantées. Du côté des fournisseurs du régiment, la part belle est faite aux entreprises audoises (environ 6 millions de francs, (914.694+E)) dont la moitié revient aux entreprises chauriennes. Le « 4 » est ainsi un acteur de poids, incontournable même, pour le commerce chaurien. Car il faut compter également avec les dépenses des ménages - ces trois cent cinquante familles installées en Lauragais - soit des centaines de consommateurs potentiels.
Au total, l'équivalent de 800.000 à 900.000 F (121.959 à 137.204+E) sont injectés mensuellement par le « 4 » dans l'économie locale. Chaque semaine, c'est une centaine de personnels qui transitent par la gare SNCF. Tous les matins, deux boulangers de la ville livrent pain et viennoiserie pour l'ensemble du régiment.
COPIES POUR LEUR EFFICACITE
Sans parler des loyers payés sur la ville (environ 800.000 F par mois, 121.959+E), de l'énorme chantier que furent la création du quartier Danjou, la piscine de la caserne, ou encore le lotissement du Périé: le « 4 », participe grandement à l'équilibre économique du Lauragais
Et lui apporte aussi énormément sur le plan humain. « Ils sont copiés pour leur efficacité », confie un Chaurien. « La Légion fait partie de la vie de Castelnaudary », commente Claude Canalès, ancien maire- adjoint, colonel à la retraite, ancien chef d'état-major du « 4 ». Il en est lui-même un symbole vivant, comme le sont Peter Kathan, aujourd'hui président de l'Afdaim, ou encore Gérald Level, ancien président du club de badminton chaurien... On retrouve des légionnaires ou d'anciens légionnaires dans un très grand nombre d'entreprises et d'associations sportives ou caritatives de la ville: le rugby villeneuvois et son pack sont l'un des très nombreux exemples d'une richesse humaine inégalable.
L. G.
Les dates-clefs des cérémonies des 25 ans
Le coup d'envoi des festivités liées au vingt-cinquième anniversaire sera donné dès ce week-end, à l'occasion du quatre-vingt-unième anniversaire du régiment, qui va revêtir un faste particulier.
Vendredi. Accueil des anciens et challenge des Vélites. A 19 heures, concert de la musique de la Légion à la collégiale.
Samedi. A 8 h 45, cérémonie au Carré Légion. A 10 heures, cérémonies décentralisées dans Castelnaudary: place des Cordeliers, jardin de la mairie, place de la Liberté, jardin de la Résistance, place de Verdun, square Victor-Hugo. Puis mise en place de la Musique de la légion étrangère et des compagnies d'engagés volontaires place de la République.
A 10 h 45, début de la prise d'armes commémorant le 81e anniversaire de la création du régiment, présidée par le général de division Bernard Grail, commandant la Légion étrangère.
Dimanche. A 11 heures, messe à la collégiale, animée par la chorale du régiment.
Les fêtes de Noël, les fêtes de fin d'années, les Rois, puis Camerone, auront également une résonance toute particulière cette année.
TEMOIN - CLAUDE CANALES, ANCIEN CHEF D'ETAT-MAJOR DU « 4 » : « RETOMBEES INNOMBRABLES »
Ancien maire-adjoint de Castelnaudary, colonel à la retraite, ancien chef d'état-major du « 4 », Claude Canalès, président du comité de coordination des associations patriotiques, revient sur les liens tissés en vingt-cinq ans entre la ville et son régiment.
Quelle est la recette de l'intégration du « 4 » en Lauragais?
Cette recette, c'est le savant mélange entre toutes les activités auxquelles le régiment a pris part et les retombées économiques pour la ville. D'un côté, il y a les crèches de Noël, le cocktail de rentrée du régiment, Camerone, les aubades de la Musique principale de la Légion, les prises d'armes et les défilés, le semi-marathon, les remises de képis blancs, l'aide fournie à de très nombreuses manifestations culturelles ou sportives... De l'autre, il y a les retombées sur la vie économique, due à la présence de quelque 1200 hommes et environ 350 familles. Elles sont innombrables et incontestables.
On a le sentiment que cette intégration a été particulièrement rapide. Est-ce exact?
Oui. Je suis arrivé en 1981 à l'état-major du régiment. C'était chose faite. Depuis, des liens étroits, d'amitié, ont été tissés au fil des années. D'excellentes initiatives ont été prises: je pense par exemple à la convention passée avec le lycée Andréossy, qui permet à des élèves de travailler sur des chantiers-écoles au sein du quartier Danjou. Le fait que le régiment participe à de très nombreuses manifestations a joué, mais il y a également son sens du service rendu.
C'est-à-dire?
Le « 4 » a toujours oeuvré au renforcement des liens armée-nation. On a vu la Légion aider à la recherche de personnes disparues, crapahuter dans la neige pour retrouver des troupeaux égarés, se mobiliser aux côtés des sinistrés de l'est du département ou de la haute vallée de l'Aude. On les a vus s'engager pour le Téléthon, s'impliquer dans la vie associative... Le « 4 » est devenu un élément majeur de la vie chaurienne.
1976 : LA DATE DE LEUR ARRIVEE
23 novembre 1976, c'est la date officielle de l'arrivée des képis blancs. Le « 4 » commencera à fêter cet anniversaire dès ce week-end, à l'occasion du 81e anniversaire du régiment.
1.200 HOMMES
Le « 4 », c'est 1.200 hommes, du chef de corps au tout dernier engagé volontaire, mais aussi 350 familles, 400 enfants scolarisés et une centaine de naissances par an, près d'un tiers du total, pour 20 % de la population.
3,5 MILLIONS DE FRANCS
Un tiers du budget annuel de fonctionnement du régiment, soit 3,5 millions de francs, est injecté chaque année dans l'économie locale. Les légionnaires et leurs familles ont dépensé 60 millions de francs en 1998.