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Marseille : il doit sa vie à la solidarité des habitants

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LaProvence.com

Lundi 18/01/2016

À la rue depuis 15 ans, ce vieux monsieur doit sa survie à la solidarité des habitants de la place du 4-Septembre

Actualités - Marseille : il doit sa vie à la solidarité des habitants
Grâce au Samu social et à la fondation Saint-Jean-de-Dieu, Bernard a retrouvé il ya quelques jours une chambre et un lit. Photo Valérie Vrel

"J'en ai connu des malheurs dans la vie ! Tè, aujourd'hui, je devrais être mort !" lance Bernard. Et il part d'un grand éclat de rire qui le fait rebondir sur son matelas. Depuis deux jours qu'il a retrouvé un lit, un vrai, à la fondation Saint-Jean-de-Dieu (12e), il n'arrête pas de rire, Bernard, en racontant comment, pendant plus de 15 ans, il a dormi sur un banc, à la place du 4-Septembre.

Car il y a quelques jours encore, monsieur Bernard Drouneau, 81 ans, vivait dans la rue, comme de plus en plus de personnes âgées, qu'un accident de la vie, un problème financier, un loyer non payé poussent dans la solitude et la marginalité.

"Depuis que nous faisons des maraudes jusqu'au coeur de la nuit, nous découvrons des sans-abri que nous n'avions jamais croisés auparavant", explique René Giancarli, le directeur du Samu social, qui a appris tout récemment l'existence de ce vieil homme oublié. Une population fantôme qui ne fréquente pas les structures d'accueil pour SDF, qui ne se fait pas connaître des services d'aide sociale. Qui ne demande plus rien à personne. Avec une infinie patience, les agents du Samu social s'emploient à retisser des liens avec ces "invisibles". Certains finissent par accepter de parler de leur parcours. Des récits toujours bouleversants.

Pour Bernard, "on a compris que c'est après un drame, le décès de sa femme et de sa fille, qu'il a tout lâché", explique René Giancarli.

"Quand mon épouse est morte, il y a 15 ans, j'ai dû rendre les clés de mon appartement, rue Chateaubriand, car le loyer était à son nom et le propriétaire a voulu récupérer le logement", se souvient le vieux monsieur. Seul, déboussolé, malade de chagrin, il a peu à peu sombré dans l'errance et le désespoir. "J'ai bien essayé de trouver une autre location, mais à mon âge, personne n'a voulu me faire un bail. Il y a quelques années, un propriétaire m'a même dit : “Et si vous mourez dans trois jours, comment je vais récupérer mon argent ?” J'ai répondu : “Ce n'est pas moi qui vais mourir, et toi, tu peux aller crever !”", raconte-t-il, hilare.

"Pendant toutes ces années, les gens du quartier m'ont aidé, nourri"

Sa petite retraite de 800 € ne lui a pas permis de retrouver un logement. Mais Bernard n'est pas mort. A 81 ans, il est même plutôt gaillard. Ne pas céder à l'alcool, ne pas aimer la cigarette, rester propre sur soi, ça conserve. Il y a quand même cette douleur à la jambe. Et cette canne dont il ne peut plus se passer depuis l'accident. Le mois dernier, un scooter l'a renversé devant la Caisse d'Epargne. "C'était deux jeunes. Ils m'ont foncé dessus pour me voler ma sacoche. Ils devaient croire que j'étais allé retirer des sous !", blague encore Bernard. Projeté à terre, il n'a pas voulu que les pompiers le conduisent à l'hôpital. "Dans la vie, vous voyez, je me suis toujours débrouillé tout seul."

Né au Panier, énième marmot d'une famille nombreuse, des parents décédés prématurément, Bernard raconte avoir été placé à l'âge de 13 ans, chez un couple de région parisienne. "Ces gens-là, c'était des Thénardier ! Ils m'ont envoyé travailler comme échaudeur aux Halles, et ils encaissaient ma paye. Alors, je me suis enfui." Le gamin retrouve un travail, dans une boucherie de Monthléry au Sud-Ouest de Paris. "Au magasin, il y avait trois Bernard, alors la patronne a décidé qu'on m'appellerait Marseille, et ça m'est resté." "Marseille" continuera sa carrière de boucher à Saint-Tropez, se mariera, puis ira filer une retraite paisible dans sa ville natale. Jusqu'au drame dont il ne veut ou ne peut plus parler.

Sur sa vie dans la rue, en revanche, Bernard est intarissable. Ses douches l'été aux Catalans : "Le matin, j'attendais dès l'ouverture de la plage." Ses heures passées dans les bars, à suivre les parties de cartes : "Aux 4-Septembre, il y a de redoutables équipes !" Les nuits difficiles sur les bancs aussi. Mais surtout, la formidable solidarité des gens du quartier qui, toutes ces années, lui ont permis de survivre sans toit. "Il y avait une dame, une mère de trois petits qui me faisait souvent à manger. Elle envoyait l'un des enfants me porter ma gamelle." Au snack de l'avenue Pasteur, tenu par un ancien légionnaire, "il y avait toujours un repas pour moi. Et un croissant chaud quand je revenais de la douche." Et puis Bernard remercie Philippe, l'employé du supermarché, "qui m'a permis de passer les nuits d'hiver au chaud en m'ouvrant la porte des locaux du magasin."

"Pendant toutes ces années, ces gens-là m'ont aidé et nourri. Je crois bien que c'est grâce à eux que je ne suis pas mort aujourd'hui." Et Bernard, enfin, laisse venir les larmes.


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