LE MONDE | 13.07.2015 Par Nathalie Guibert
Parmi les choses qui auront diminué en 2015 en France, on peut mentionner l’emploi salarié, le prix du lait ou les déficits publics – un peu. Le défilé du 14-Juillet, lui aussi, a rétréci. « Quinze minutes en moins », « 30 % d’engins en moins », « pas de troupes du génie, pas de chars XL si appréciés du public », a égrené le gouverneur militaire de Paris, le général Hervé Charpentier, en présentant le cru 2015, le dernier pour ce parachutiste de l’infanterie de marine bientôt retraité.
Ce serait « faire injure à tous ceux qui travaillent depuis un an » à la réussite de ce rendez-vous populaire de le qualifier de défilé au rabais. « C’est une belle cérémonie », assure son chorégraphe en chef, qui mentionne de nouveaux matériels tel que le lance-roquettes unitaire de l’armée de terre ou les drones.
Mais avec 3 500 hommes (soit 290 de moins), 208 véhicules (77 de moins) et 86 aéronefs (4 de moins), l’édition est bien celle d’une armée qui n’a plus assez de forces pour assurer en même temps la guerre et la parade. « C’est une mesure liée à la suractivité opérationnelle, au surengagement des hommes », a-t-il été précisé. En début d’année, après les attentats, 10 000 soldats ont été déployés sur le territoire national ; autant l’étaient dans les opérations extérieures, soit beaucoup plus que ne le permettaient les ressources allouées aux armées. Les effectifs ont désormais été revus à 7 000 pour les deux opérations, mais la machine reste en surchauffe.
Voir ci-dessous : la composition exacte du défilé du 14-Juillet.
Risques terroristes
Victimes collatérales, les rencontres prévues avec les Franciliens à l’issue du défilé, avec exposition de matériel et photos souvenirs, sont annulées en dépit de leur succès. « Ce remarquable rendez-vous du lien entre l’armée et la nation, occasion pour nous de faire passer tous les messages de modernité et de recrutement », selon les mots du général, n’aura pas lieu en raison des risques liés à la menace terroriste et de la disponibilité des troupes. L’état-major des armées a exigé que les soldats, sitôt les Champs-Elysées descendus, filent assurer la relève de leurs camarades ou prennent leurs permissions.
Très rétrécis eux aussi sont les bureaux modernes des chefs des trois armées, dans lesquels ils ont emménagé ces jours derniers au « Balardgone », le nouveau siège du ministère de la défense dans le 15e arrondissement de Paris. Les généraux vivent un moment paradoxal, car on leur demande de voir plus grand. Les armées sont mobilisées sur des plans d’embauche inattendus, depuis que 18 500 des 34 000 emplois qu’elles devaient supprimer d’ici 2019 ont été sauvés par le président de la République pour répondre aux besoins sécuritaires de la France, après les attentats de janvier.