L'autre guerre du légionnaire
Publié le vendredi 05 mars 2010 à 12H50
Confronté à de graves problèmes financiers, Freitas Da Silva-Alvaro devrait être expulsé de chez lui aujourd'hui
L'ancien légionnaire Freitas Da Silva, son amie Elismène Jouve et la petite Nina risquent d'être expulsés ce matin de la maison du lotissement des Jardins de la Meyne. Photo Francis Pabst |
Ils savent que je vais bientôt mourir. Alors ils font traîner pour ne pas payer! C'est comme ça qu'on me remercie d'avoir servi la France pendant 20 ans..." Amer, indigné, révolté, Freitas Da Silva-Alvaro évoque la situation désespérée à laquelle il est confronté depuis le 21 janvier 2006, date de son accident du travail.
Aujourd'hui, vers 10 heures, les huissiers devraient sonner à sa porte, pour l'expulser de la maison sise dans le lotissement des Jardins de la Meyne, maison qu'il occupe avec son amie Elismène Jouve et le bébé de celle-ci. Cette terrible issue désole cet ancien légionnaire de 43 ans, en très mauvaise santé...
Une décharge de 380 volts Rayé des rangs de la Légion le 15 novembre 2003 après deux décennies de bons et loyaux services, l'avenir s'annonçait plutôt bien pour ce solide gaillard, qui venait d'effectuer une formation de poseur menuisier; jusqu'à ce funeste jour où, sur un chantier, il prend une décharge de 380 volts! "S'il s'en sort, il ne verra plus, il ne parlera plus, il ne marchera plus..." diagnostique le corps médical, très pessimiste sur les chances de survie de l'Orangeois. Finalement, Freitas s'en tire, mais lourdement handicapé. "Je suis paralysé du côté gauche. J'ai de graves crises d'épilepsie à répétition. Je souffre d'une dissection carotidienne non opérable, puisque je suis hémophile. Sans parler de ma dépression..." explique-t-il en brandissant une liasse de certificats médicaux.
Cependant, malgré toutes les démarches entreprises, son "Invalidité absolue définitive (IAD)" n'a toujours pas été officialisée par le médecin expert. "Depuis des mois, on me promène. Il manque toujours un papier, une précision, un détail pour que le dossier soit bouclé. Je suis sûr qu'ils le font exprès... Ils savent qu'une fois que je serai déclaré IAD, l'assurance devra payer la maison, puisque je suis assuré pour ça... Mais pour l'instant, je suis juste considéré comme "invalide temporaire à 80%" et je vais me retrouver à la rue..."
En fait, depuis son accident, Freitas Da Silva-Alvaro n'a plus pu honorer les traites mensuelles de 550€, correspondant au crédit de sa villa. 550€ de crédit, 312€ de revenus "Comment voulez-vous qu'il fasse? Il n'a que 312€ pour vivre", se lamente Mlle Jouve, elle aussi ancienne militaire. "Regardez: les comptes sont vite faits. Il touche 712€ par trimestre de la Caisse primaire d'assurance maladie, auxquels s'ajoutent ses 75€ de "retraite" de la Légion; 75€, c'est ce qui lui reste une fois qu'on a enlevé les 375€ de pension qu'il verse à son ex-épouse et à ses trois enfants..." Certes, à la suite de son accident, l'ancien légionnaire a bien reçu un chèque de plusieurs milliers d'euros de son assurance, le Groupement Militaire de Prévoyance des Armées (GMPA).
Mais, "une fois les dettes payées, il n'en est rien resté.." Mercredi, ne sachant plus à quel saint de vouer, Elismène Jouve a contacté le Centre communal d'action sociale d'Orange (CCAS). "Ils m'ont dit d'attendre la fin du mois..." dit-elle. "Mais la fin du mois, c'est trop tard!.. Que va-t-on devenir?..." Face à ce désarroi, Freitas Da Silva-Alvaro réagit : "Si les huissiers me mettent dehors, je prendrai ma tente militaire et j'irai m'installer devant la mairie... Alors que j'ai risqué ma vie pour la patrie, ce qu'on me fait, c'est honteux!"Même à bout de forces, le guerrier refuse de rendre les armes.
Cependant, aujourd'hui, c'est une autre guerre qu'il livre, sans doute moins physique mais tout aussi décisive pour lui, pour son amie Elismène et pour la petite Nina...
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