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Les frères Wahid, un peu plus près des étoiles

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3 août 2009

D’une enfance au Pakistan à l’une des plus belles tables de Provence, le parcours exemplaire de Shahzad-Sylvestre et Jawad-Jonathan. 

Tous ceux qui sont déjà allés au Pakistan vous le diront : Sylvestre Wahid, 34 ans, avance nimbé d’un nuage de parfum digne d’une bouffée humée dans un jardin d’Islamabad, la capitale du pays qui l’a vu naître. Un bouquet d’épices, suave et sucré, qui tranche avec le paysage de roches et d’oliviers dont ce chef étoilé a fait son royaume. A ses côtés, en guise de prince consort, son frère cadet Jonathan, 33 ans, champion de France des desserts.

Cheveux noirs et sourires ultrabright, unis par une évidente complicité (l’un commence les phrases que l’autre finit), les frères Wahid manient aussi bien le terroir provençal qu’ils ont adopté que les saveurs orientales qui les ont bercés, rajeunissant une table jusque-là plus réputée pour ses traditions culinaires que pour ses poses avant-gardistes. La venue de ces jeunes pousses de la "cuisine moderne" a d’abord effrayé les habitués de l’Oustau de Baumanière, l’auberge qui accueille les stars de passage dans ce coin de Provence sélect, au pied du village des Baux-de-Provence (Bouches-du-Rhône).

Pas de quoi les impressionner, ils savent tracer leur chemin: "Quand j’ai annoncé à ma mère que je serais cuisinier, elle s’est mise à pleurer. Plus tard, quand elle a su que Jonathan voulait être pâtissier, elle a carrément fait la gueule." Maman Wahid pouvait-elle imaginer que ses deux fils feraient un tel parcours, loin des clichés de deux fils d’immigrés abonnés à la plonge ?

Leur père a changé leurs prénoms en arrivant en France

Sylvestre et Jonathan parlent avec respect de cette mère qui, un jour de mars 1984, a réveillé ses quatre enfants, deux filles et deux garçons endormis dans la maison familiale de Kohat, petite ville pakistanaise perchée sur les contreforts de l’Hindu Kush: "On va rejoindre votre père." Un père qu’ils n’avaient pas revu depuis sept ans, parti s’engager dans la Légion étrangère. Devenu officier, celui-ci venait d’obtenir le droit d’accueillir sa famille au nom du regroupement familial.

Quelques valises jetées dans un bus bringuebalant ("on nous avait dit de ne pas prendre trop d’affaires, on partait pour une nouvelle vie"), dix heures d’avion, et les voilà installés à Nîmes, ne parlant que leur langue natale, l’ourdou. "Je me souviendrai toujours de ma petite soeur, née juste après le départ de mon père, qui se demandait avec inquiétude qui était l’homme qui embrassait notre mère à Roissy", sourit Sylvestre. Les deux frères disent que leur pays natal ne leur manque pas: "Mon père a tout fait pour que nous soyons bien intégrés. Nous sommes de culture musulmane, il nous a inscrits dans une école privée catholique. Il tenait à ce que nous parlions français avec lui. Il a changé nos prénoms à l’arrivée en France."

Intégrés, Shahzad-Sylvestre et Jawad-Jonathan le sont désormais mieux que n’auraient pu l’espérer leurs parents, aujourd’hui retraités. Ce matin, Pierre Arditi leur a claqué la bise avant de partir. Ils ont déjà cuisiné pour une brochette de célébrités, à l’Oustau, bien sûr, mais aussi pour des banquets privés, dans le monde entier. La femme de Vladimir Poutine à Moscou ou l’explorateur Mike Horn, pour un repas éphémère sur un iceberg au Groenland… Ce sont également les belles rencontres qui ont tricoté leur parcours, des fées coiffées de toques étoilées, nommées Alain Ducasse, Thierry Marx ou Jean-André Charial. Ce dernier, propriétaire de l’Oustau, leur a offert leur plus belle chance: "C’est un homme pragmatique et audacieux. Il a bousculé les codes en nous engageant." Les deux frères se sont installés au village. L’un, Jonathan, avec sa femme et ses deux enfants ; l’autre, Sylvestre, "marié à la cuisine".

Jean-André Charial, le voici, justement, tout à son déjeuner sur une table dressée pour lui en cuisine, au milieu de la brigade de 28 personnes prise dans le coup de feu du déjeuner. L’homme n’est pas réputé commode et rappelle franco que les départs ont été difficiles: "Cette maison a une âme et des traditions. Nous avions aussi besoin d’un coup de jeune, mais Sylvestre et Jonathan sont arrivés avec une cuisine de palace. Ça a pris du temps pour qu’ils regardent les oliviers, qu’ils respirent la garrigue et le traduisent en cuisine, mais on y est arrivés." Tellement bien qu’ils ont un nouveau projet ensemble: un restaurant d’hiver à Courchevel, là-haut, dans ces montagnes qui leur rappelleront peut-être un peu les sommets étincelants de l’Hindu Kush.

Guylaine Idoux - Le Journal du Dimanche

lundi 03 août 2009


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