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"De l'autre côté de l'eau" : un petit bijou de lecture

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18 mai 2009

 

Motte
Dès la première page, l’auteur nous avertit : ce livre «n’ajoutera rien à la compréhension de la guerre d’Indochine». C’est parfaitement exact et l’on s’en moque. S’il faut le lire, c’est bien plutôt pour ce qu’il apporte à la connaissance de l’âme humaine, sans prendre de poses, sans même avoir l’air d’en parler. C’est un peu le Crabe-Tambour de Pierre Schoendoerffer, l’humour en plus.

Dominique de La Motte est aujourd’hui un général à la retraite. Aristocrate, cavalier, catholique, il pourrait être la caricature de son milieu. Sauf qu’il est «un peu braque», comme il dit. Suffisamment pour se porter volontaire comme chef d’un commando de partisans indochinois de février 1951 à juin 1952. Ce ne sont pas ses notes qu’il publie aujourd’hui, mais le récit fragmentaire de ses souvenirs, rédigé quarante ans après et publié avec l’aide de l’historien Stéphane Audoin-Rouzeau. «Aucun fait n’est inventé ni, je l’espère, involontairement embelli. Simplement un homme âgé regarde vivre un jeune officier, sans le juger, ni en bien ni en mal. Dieu seul est juge.»

L’action se passe en Cochinchine (Vietnam du Sud) au début des années 50. Faute d’effectifs suffisants, l’armée française fait appel à des supplétifs locaux pour tenir le terrain face au Vietminh communiste. Un jeune lieutenant de 26 ans, sorti de Saint-Cyr et de Saumur, se porte volontaire. On lui confie un secteur d’une trentaine de kilomètres, avec une route et une plantation d’hévéas à protéger. Au nord, une zone interdite où il peut, à loisir, aller guerroyer contre les communistes.

«Je n’ai jamais voulu être roi, je l’ai été, non par la volonté de la République ou de mes supérieurs, non plus que par la mienne, mais par celle des hommes que je commandais, mes partisans», confesse-t-il. Tout roi a sa Cour : celle du lieutenant Dominique de La Motte se compose de huit hommes, quatre sous-officiers français et quatre indigènes. Autant de portraits truculents. «Mon mentor a été un très vieux Chinois, l’adjudant Niem, retraité de la Coloniale. Il était un peu gâteux, malin et plus raciste qu’il n’est possible. Sa hiérarchie des races n’était pas celle du comte de Gobineau Il y avait au-dessus de tout les Chinois […] enfin les Khmers du Cambodge, sous-race parfaitement méprisable.» Le commando d’environ 130 hommes est recruté localement. Il y a des Vietnamiens de Cochinchine et des Khmers. Leur motivation est essentiellement alimentaire et ce qu’ils attendent de leur chef, c’est qu’il soit leur roi. Le lieutenant va se plier au jeu sans y perdre son âme : il ne sera pas le colonel Kurtz de Conrad, revisité par Apocalypse Now.

L’humour le sauve, l’humour et une foi aussi assurée que peu ostentatoire. Cela lui permettra de traverser sans trop de dégâts - sauf pour sa santé - les aventures et les épisodes qu’il raconte au fil de courts chapitres : les planteurs, les congaïs (femmes vietnamiennes), les animaux, la Légion, le corps médical, la secte syncrétiste des caodaïstes, la guerre révolutionnaire. Cette guerre qu’il est allé mener «de l’autre côté de l’eau», celle de la rivière Sanh Dai. Cette autre rive qui est aussi celle de Blaise Pascal : «Pourquoi me tuez-vous ? Eh quoi ! Ne demeurez-vous pas de l’autre côté de l’eau ?» Toute loufoque qu’elle soit, la guerre rend sage.

Dominique de La Motte De l’autre côté de l’eau. Indochine 1950-1952 Tallandier, 166 pp., 18 euros.

(Article initialement paru le 15 janvier 2009, dans le cahier Livres de Libération)


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