Le Progrès de Bel-Abbès du 07/04/1900
Déserteur malgré lui.
Le deuxième Conseil de guerre d'Oran a eu à juger un curieux cas de désertion.
Un soldat du 1er Étranger, en garnison à Sidi-Bel-Abbès, le nommé Kauffman, originaire des pays annexés, avait obtenu une permission de 30 jours pour voir ses parents à Paris.
En arrivant, il y avait trouvé une dépêche de sa mère, domiciliée en territoire allemand, et qui lui donnait rendez-vous dans un village situé en terre française sous prétexte d'arranger ensemble des affaires de famille.
S'étant rendu à cette invitation Kauffmanse rencontra,en effet, avec sa mère et son frère qui le firent boire, l'amenèrent avec eux au-delà de la frontière et le remirent à la gendarmerie allemande. Les parents de Kauffman agissaient ainsi, paraît il, parce que les autorités allemandes les menaçaient de confisquer leurs biens, si le jeune homme, qui avait été porté comme insoumis, ne revenait pas servir sous le drapeau du pays annexé.
Kauffman fut donc versé au 57e de Ligne allemand, et libéré au bout de 2 ans.
Malgré les siens qui l'obligeaient à rester et qui prétendaient même le faire interner dans une maison de santé, s'il persistait dans une détermination qu'ils attribuaient à un dérangement cérébral, Kauffman s'empressa, dès sa libération, de repasser la frontière et vint se déclarer déserteur, en France, à la Gendarmerie du village de Joeuf.
C'est dans ces conditions, que Kauffman était déféré au Conseil sous la prévention de désertion.
Après avoir entendu la belle plaidoierie de Me Bogros, le Conseil a été unanime à acquitter le déserteur, malgré lui.