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Dans la tourmente des guerres coloniales

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« Soldats perdus, dans la tourmente des guerres coloniales ». De l’Indochine à l’Algérie, à travers l’histoire de son père, Hélène Erlingsen réhabilite ces centaines de milliers de soldats, français, vietnamiens, africains ou algériens abandonnés par la IVe République dans des guerres perdues d’avance.
 

Ce livre retrace l’histoire de Clovis et Kléber Creste. Deux garçons pauvres et moralement abandonnés, engagés dans la Résistance dans le sud-ouest de la France puis dans l’armée coloniale pour l’un, dans la Légion étrangère pour l’autre, à 15 et 17 ans respectivement. Deux simples soldats, encore enfants, embarqués dans la tourmente des guerres coloniales : l’Indochine, le Sénégal, le Maroc, la Tunisie, le canal de Suez et l’Algérie.

Des guerres perdues d’avance, dans lesquelles la France s’enfonce, sans moyens, alors que le processus inéluctable de la décolonisation est en marche. Alors que l’inorganisation de la IVe République fera que pendant douze ans, personne au gouvernement ne se sent responsable de la mort de centaine de milliers d’individus de toutes origines.

A travers l’histoire de ces deux hommes, victimes anonymes de l’Histoire, à qui elle rend hommage magnifiquement et avec une très belle écriture, Hélène Erlingsen, fait un véritable travail d’historienne. Pendant quinze ans, elle a « exercé son métier de journaliste d’une façon très particulière : vers un passé vieux de 60 ans ». Elle a sillonné la France et le monde, pour rencontrer des témoins directs de ces guerres coloniales. Elle a ouvert des cartons d’archives, compilé des documents militaires, médicaux, politiques… Pendant quinze ans, elle a nourri pièce par pièce ce dossier à charge. Pour prouver la responsabilité de la IVe République dans ces massacres. Pour réhabiliter ces soldats français, vietnamiens, africains ou algériens, qu’elle a abandonnés.

Des soldats jetés dans la guerre dans l’indifférence générale

Ce livre est la version réduite d’une thèse de près de 5000 pages. « Ce que j’ai découvert dans d’innombrables cartons, au fil de dizaines de témoignages, a dépassé, de très loin, ce que je pouvais imaginer en souffrance et en oubli », confie Hélène Erlingsen.

Elle raconte la misère physique, morale et financière, la malnutrition, les maladies, les traumatismes, l’épuisement, l’abandon de ces jeunes soldats, mal formés, mal équipés, et pourtant d’un courage hors du commun, brutalement jetés dans la guerre d’Indochine sans aucune préparation, et dans une indifférence quasi générale. Dans un pays si peu hospitalier, « leur vie quotidienne n’est que combats et haltes dans des baraques sordides, humides, malsaines, infestées de rats et de moustiques, où l’on s’entasse et se débrouille comme on peut. » Et que dire des blessés dans ce climat chaud et humide, propice au développement de toutes les maladies ! « Souvent, les médecins découvrent des plaies putrides, parfois grouillantes d’asticots. » Le « déchet d’hommes » est d’environ 30% pour les troupes du Sud…Leur « taux d’usure » est considérable. « Toute une armée pendant 12 ans fut sacrifiée pour une cause perdue d’avance. »

En suivant pas à pas ce qu’on vécu ces deux jeunes hommes, elle a pénétré, comme personne jusqu’ici, dans les coulisses de ces guerres de décolonisation. « J’ai pu aussi y lire combien les hommes politiques les méprisaient. » D’autres les haïssaient.

En 1947, son père, Clovis Creste, n’a pas 19 ans, il a déjà vécu trois ans de guerre en Indochine. Une guerre dont personne ne voulait. Qui traîne faute d’accepter de négocier. Il en revient, pour sa première permission, borgne, avec un paludisme et des amibes qui ne le quitteront plus. Presqu’un paria dans la société française d’après-guerre. Il y retournera et passera au total 52 mois en Indochine. Faute d’avoir le temps de s’instruire, il ne peut pas monter en grade comme les soldats de métropole. « Sous la IVe République, plus on court de risque, moins on a de chance de monter en grade. »

Puis la guerre continue. De 1944 à 1958, la route des frères Creste les mena de l’Allemagne à l’Algérie en passant par l’Indochine, la Tunisie, le Sénégal, le Maroc et Suez. « Un chemin éreintant, sanglant, coupé de peu de répits. » Celui d’une armée à bout de force que l’incurie des politiques contraint à continuer à se battre.

Clovis Creste sera tué le 26 octobre 1958 à Tacheta Zouggara en Algérie, abattu à bout portant et abandonné dans un fossé. Trois jours après que le général de Gaulle a proposé « la paix des braves ». Il laisse une jeune femme effondrée et une fillette de 6 ans. « Mon père, mon oncle, étaient de pauvres gosses perdus, abandonnés, qui aimaient leur pays à en mourir. ». En 1992, Hélène se rend en Algérie et retrouve le fossé où a été retrouvé son père. « Mort pour la France ». « Tout seul ».

Hélène Erlingsen est journaliste, docteur en sciences politiques, diplômée de l’Institut national des hautes études de défense nationale et de l’Institut national des hautes études de sécurité.

Gisèle Prévost


Traduction

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