La Newsletter 16/19 de l'AALEME |
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PROPOSITION DE LOI visant à l’instauration d’une journée du souvenir pour Diên Biên Phu,
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Les premières années de Diego Suarez - 1903 : La fin d’une époque… Joffre s’en vaA gauche : la statue de Joffre veille toujours sur le port de Diego Suarez. A droite : Le Colonel Joffre et ses collaborateurs à Diego Suarez en 1901 L’année 1903 a surtout été marquée par le départ du Général Joffre qui laissera derrière lui une ville métamorphosée et un Point d’Appui… à terminer !Le départ de JoffreArrivé à Diego Suarez en février 1900, le colonel Joffre, devenu entre temps général, et maintenu à son poste de Diego Suarez sur l’intervention du Général Gallieni, quitta le territoire qu’il dirigeait depuis trois ans, le 5 avril 1903, à 5 heures du soir, à bord du paquebot « Djemnah ». Son départ avait donné lieu à de nombreuses manifestations de la part de la population et des autorités. Il avait reçu, le 2 avril, des « délégations indigènes de toutes les parties du territoire », le 3 avril, le Cercle Français avait donné en son honneur une soirée dansante ; le 4 avril ce sont les fonctionnaires, l’Administrateur-Maire et la Chambre consultative qui étaient venus le remercier de « l’œuvre de développement économique qu’il a réalisée à Diego et qui a fait de cette ville une place commerciale et un port de première importance » (J.O de Madagascar) L’oeuvre de Joffre à Diego Suarez : ombres et lumièresLes grands travaux de la ville Le climat social sous le commandement de JoffreLes relations entre la population civile et les militaires ne sont pas toujours parfaitement sereines. En témoigne l’incident qui se produit le 4 janvier 1904 entre tirailleurs sénégalais et habitants de Tanambao : « Des tirailleurs sénégalais ayant trouvé dans la brousse le cadavre d’un de leurs compatriotes se sont rendus en nombre au Tanambao et supposant que les indigènes étaient les auteurs de cet assassinat, ils en ont tué trois et blessé une dizaine… Les femmes terrorisées ont fui, se réfugiant à Antinabe ». (Revue de Madagascar). Il fut donc décidé de déplacer le camp des tirailleurs à Diego Suarez et de leur retirer leurs armes. Par ailleurs, si la pénurie induit des salaires relativement élevés (par rapport aux autres régions de l’île) pour la main d’œuvre (entre 150 et 175 euros par mois, plus la ration de riz), nous avons vu que certains patrons « oubliaient » de payer leurs employés. La Feuille de renseignements économiques fait état des réclamations des employeurs devant les exigences de leurs employés : « Le nombre des indigènes engagés au 1er janvier dernier au service des colons, industriels ou services publics, s’élevait au chiffre de 1800. Les prétentions exagérées de la main d’œuvre somali employée au service des transports a soulevé une discussion parmi les membres de la Chambre consultative [...] Les Arabes arrivent à demander jusqu’à 6 et 7 francs par jour (environ 25 euros ou 85 000 ariary)… » Les revendications des Somalis vont même parvenir à Paris. Le journal socialiste L’Humanité, évoque le 31 janvier 1904 la pétition des somalis que l’on veut assujettir à la taxe par tête de 20 F que payent tous les « indigènes ». Arguant du fait qu’ils ont servi dans l’Armée française ils refusent de payer cette taxe car ils vivent misérablement (ils sont chargés du batelage du port) et demandent à être rapatriés chez eux. Comme on le voit si Joffre, à son départ, laisse indiscutablement une ville transformée, en voie de se moderniser, tout n’est pas au beau fixe dans le Territoire de Diego Suarez. En fait, Joffre avait été nommé pour mettre en place le Point d’Appui de la flotte de l’Océan Indien : il a vraisemblablement porté l’essentiel de ses efforts sur ce qui constituait le centre de sa mission, les travaux militaires et regardé d’un œil plus distrait les problèmes de la population civile… |
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JUPPÉ : Arrogance et autisme. Billet du général Henri PINARD LEGRY, Président de l'ASAF.Posté le mercredi 27 avril 2016 Les propos tenus le 25 avril devant des étudiants de l’IEP de Bordeaux par monsieur Juppé au sujet du général de corps d’armée Bertrand Soubelet sont parfaitement incongrus et incompréhensibles au regard des responsabilités qui lui ont été confiées dans le passé et de celles auxquelles il aspire pour l’avenir proche. « Un militaire, c'est comme un ministre : ça ferme sa gueule ou ça s'en va » Les militaires, y compris ceux qui appartiennent au haut commandement, ont donc le devoir de s’exprimer devant les élus et les Français avec la plus grande franchise. Dire d’autre part que : « Les militaires ont le droit de penser mais il y a des limites à ne pas dépasser » est non seulement inconvenant mais proprement scandaleux. C’est la marque d’une suffisance voire d’une arrogance détestables souvent attachées d’ailleurs à l’image que les Français ont de l’auteur de cette sentence. Qu’aurait dit monsieur Juppé si l’on avait appris que le général Soubelet avait caché la vérité à la représentation nationale ? Aurait-il félicité ce général d’avoir menti par omission ? En écoutant ces propos, on comprend bien pourquoi les Français disent ne plus avoir confiance en une classe politique autiste. Ils souhaitent maintenant des chefs francs et clairvoyants, courageux et animés du seul souci de servir l’intérêt général. En considérant les militaires comme de simples exécutants muets, monsieur Juppé exprime en fait sa volonté de voir une caste politicienne conserver le pouvoir et ses prérogatives, en faisant taire les Français qui veulent ardemment sortir la France de l’impasse dans laquelle elle se trouve.
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30 avril 2016, Camerone, c’était il y a 153 ans ! par le Colonel Jean-François CERISIERsamedi 30 avril 2016 ARMÉE
« La 3e du 1er est morte, mon colonel, mais elle en a assez fait pour que, en parlant d’elle, on puisse dire : elle n’avait que de bons soldats ! » Le Caporal BERG, survivant de Camerone, au Colonel JEANNINGROS.
Le combat de CAMERONE, son récit, bien sûr, tout le monde connaît. Mais, qu’en est-il vraiment ?
Ce récit d’une bataille de titans, lu dans toutes les Unités, dans tous les Détachements, dans toutes les Amicales de la Légion Étrangère, où qu’ils soient de par le monde, quelles que soient les conditions, mérite une attention particulière.
Il convient d’en connaître le contexte, ce qui permet de comprendre que le combat de CAMERONE est celui d’Hommes, faits de chair et de sang, de Soldats étrangers au Service de la FRANCE, ayant choisi de Servir avec Honneur et Fidélité, jusqu’au sacrifice suprême, si nécessaire...
Cela ne peut pas être un simple récit, comme il en est fait tous les jours dans tous les organes de presse.
Non, car il s’agit d’une véritable chanson de geste. (1)
Le thème musical ne peut être ici que « le Boudin ». Quel autre pourrait convenir ?
Pour lire ce texte, il conviendrait donc que vous « entendiez cette marche légendaire ». Je vais essayer de vous raconter cette geste.
Pour cela, j’ai utilisé LA référence en la matière : le Livre d’Or de la Légion Étrangère, pièce exceptionnelle parmi les ouvrages qui constituent ma bibliothèque. (2)
Début de citation du Livre d'Or…
CONTEXTE HISTORIQUE
C’est celui de l’expédition du MEXIQUE, voulue par l’empereur Napoléon III, alors que des Français avaient à souffrir de la guerre civile dans laquelle étaient impliqués les partisans de JUAREZ... Mais, d’après les historiens, la véritable justification de l ‘expédition du Mexique a été « l’intention de Napoléon III de réaliser l’union des races latines contre l’expansion des États-Unis ».
Un premier contingent français a été débarqué à VERA-CRUZ en 1862. Suite à l’imposition de l’archiduc Maximilien (frère de l’empereur d’AUTRICHE) comme souverain du MEXIQUE, « Napoléon III a été engagé dans une opération dont l’envergure dépassait l’objet ».
DANS LES TERRES CHAUDES
Le Régiment Étranger n’ayant pas été prévu dans la composition du Corps expéditionnaire français destiné au MEXIQUE, les officiers subalternes, à la fin de 1862, adressent directement une pétition à l’Empereur.
Cette démarche insolite est couronnée de succès : le plus ancien dans chaque grade est puni, mais le 19 janvier 1863, le colonel reçoit l’ordre de se tenir prêt à partir avec deux bataillons.
Le colonel JEANNINGROS, commandant le Régiment Étranger, est une personnalité. Enfant de troupe au 66e de Ligne, il est soldat depuis l’âge de 14 ans. A 19 ans, il reçoit le baptême du feu et sa première blessure au combat de Moulay-Ismaël, en 1835. Quand, l’année suivante, il entre au corps des Zouaves, il a été blessé trois fois. Il le sera encore trois fois pendant qu’il franchira tous les grades jusqu’à celui de colonel du 43e de Ligne, d’où il passe sur sa demande, à la tête du régiment Étranger, le 24 mars 1862.
Homme d’action, rude de caractère, JEANNINGROS n’a jamais servi à la Légion ; cependant, il la connaît bien et possède toutes les qualités lui permettant de s’imposer à cette troupe d’élite. D’origine modeste, ne sortant d’aucune école, il doit son élévation à ses connaissances en art militaire et à une profonde expérience de la guerre.
Les débuts de la campagne du MEXIQUE sont, pour le régiment Étranger, une déception : à l’effectif d’environ 2000 hommes (deux bataillons à sept compagnies, compagnie hors-rang et musique), il reçoit pour mission la garde des Terres Chaudes et la protection des convois entre le port de Vera-Cruz et Puebla, dont on fait le siège. Cent- vingt kilomètres de pays à surveiller en zone tropicale, où sévissent le paludisme, le typhus et le « vomito negro », la terrible fièvre jaune.
Surveillance active, car les bandes de guérilleros profitent de la moindre faute avec une rare habilité. En outre, la population est, bien entendu, à la dévotion de ces bandes. Ainsi, c’est une obscure besogne « d’arrière » qui est donnée aux légionnaires venus au MEXIQUE pour en découdre et de préférence, comme de coutume, au premier rang. c’est cependant grâce à cette mission de police que la légion allait atteindre, avec le sommet de l’héroïsme, « l’immortalité de Camerone », et que les fastes de l’Armée française devaient s’enrichir d’un « des plus brillants faits d’armes qu’on ait dressé à sa gloire ».
LE SACRIFICE SUPRÊME À CAMERONE
Presque jour pour jour, ce fut un mois après le débarquement du Régiment Étranger au MEXIQUE qu’eût lieu le combat de Camerone, action héroïque entre toutes dont, plus tard, l’anniversaire sera célébré avec éclat à la Légion.
Le 29 avril 1863, à Chiquihuite, le colonel JEANNINGROS apprend le départ de Vera-Cruz d’un important convoi pour Puebla ; du matériel de siège, des munitions et trois millions en numéraires. Après le diner, le colonel en parle au capitaine DANJOU, adjudant-major du 1er bataillon.
L’insécurité de la région que surveille ce bataillon, de Passo del macho (passage du mulet) jusqu’à Chiquihuite et à la rivière de l’Atoyac, impose l’envoi d’une compagnie au-devant du convoi, propose DANJOU. Tirant de sa poche un carnet, accessoire essentiel de ses fonctions, le capitaine y voit que c’est le tour de la 3e compagnie à marcher ; mais, constatant que tous les officiers de celle-ci sont malades et que le poste de capitaine est vacant, il propose au colonel de prendre le commandement pour la durée de l’opération. Le colonel JEANNINGROS accepte.
Du fait de ses fonctions, DANJOU fait popote avec le porte-drapeau, le sous-lieutenant MAUDET, et l’officier-payeur, le sous-lieutenant VILAIN. Apprenant que DANJOU partait pour cette course d’une journée, ils demandèrent et obtinrent de l’accompagner.
Ainsi, aucun des officiers de cette compagnie ne marchait pour son tour et à sa place.
Jean DANJOU est né à Chalabre, non loin des Pyrénées dont les crêtes neigeuses se distinguent très bien de ce petit bourg de l’Aude. Sa vocation militaire date du jour où, à la table de la famille, un officier fit le récit de ses campagnes en AFRIQUE. Sorti de Saint-Cyr à vingt ans et incorporé au 51e de Ligne, il passe trois ans plus tard, en 1852, au 2e régiment Étranger, qu’il ne quitte plus désormais et avec lequel il prend part aux campagnes de KABYLIE, de CRIMEE, d’ITALIE, du MAROC, et enfin du MEXIQUE. Il est capitaine devant Sébastopol ; sa belle conduite et une grave blessure lui valent la croix de la Légion d’Honneur. Amputé de la main gauche, il s’est fait faire une main de bois, dont il se sert avec adresse « même pour monter à cheval ». Officier de grand avenir, DANJOU était l’objet de l’admiration de tous ceux qui le connurent ; il fut un vrai chef de Légion, ayant du coup d’œil, du sang-froid, de l’autorité et bien entendu, de la bravoure. Le caporal MAINE a complété ce portrait : « Je le reverrai toujours, avec sa belle tête intelligente, où l’énergie se tempérait si bien par la douceur ».
Sorti du rang, le sous-lieutenant VILAIN a été décoré comme sergent-major à Magenta. MAUDET était « un de ces vieux braves comme on en choisissait alors pour porte-drapeau », écrit le général ZÉDÉ. Ces trois officiers sont à la hauteur de la terrible situation dans laquelle ils allaient inopinément se trouver.
Quant à la 3e compagnie, c’était une des plus solides du régiment et, en examinant sa composition, on croirait lire le contrôle nominatif d’une compagnie actuelle de légion. Il y a des Polonais et des Allemands, des belges, des Italiens, des Espagnols, et une majorité de Français.
Le caporal MAINE a gagné la Légion d’Honneur comme sous-officier de chasseurs à pieds à l’assaut de Malakoff ; il a rendu ses galons pour s’engager à la légion et partir avec elle au MEXIQUE.
Le caporal BERG est un ancien lieutenant de Zouaves.
Le plus jeune légionnaire est un Polonais de 19 ans, GORSKI ; il reçut la médaille militaire après Camerone.
Lorsqu’au début de sa carrière le sous-lieutenant CLEMENT-GRANDCOURT, plus tard général arriva à Sidi-Bel-Abbès, le Légionnaire KUNASSEK venait de quitter la Légion ; c’était le dernier des survivants de Camerone.
Ainsi, bien que venu de tous les milieux et de tous les pays, les soixante-deux hommes se trouvant sur les rangs de la 3e compagnie le 29 avril 1863, feront bloc le lendemain, comme toujours à la Légion.
LE 30 AVRIL 1863...
Le 30 avril à une heure du matin, le capitaine DANJOU se met en route avec sa petite colonne ; sa mission est de gagner Palo-Verde (taillis vert) et d’explorer les environs à une lieue de ce point, battant les abords de la route pour déceler et disperser les embuscades des guérilleros.
Les légionnaires sont en veste de petite tenue avec épaulettes, et pantalon de treillis. Ils portent le grand sombrero de latanier, mais pour la marche seulement ; le képi est accroché à la musette par les jugulaires. Pas de havresac ; les vivres et les munitions sont chargées sur deux mulets ; on n’a pas pris d’outils et leur absence se fera cruellement sentir. Fusils à piston, rayés, la munition est une balle cylindrique ; 60 cartouches par homme dans les gibernes. Le capitaine DANJOU possède une carte dressée par l’État- major français.
Le relief du terrain des « Tierras Calidas » est peu accentué ; végétation tropicale, cultures, plantations d’arbres fruitiers, lacs de boue par temps de pluie, ruisseaux (en raison de son nom, celui de Cameron, ou plus exactement Camaron, doit contenir beaucoup d’écrevisses) ; maisons misérables, la plupart en ruines.
Toujours parfaitement renseignés par les Indiens de nos plus légers mouvements, les Mexicains ont appris la date du départ du convoi de la Soledad et décidé de l’enlever.
Une force importante se concentre vers la Coya, à proximité de notre ligne de communication : 800 cavaliers dont 500 réguliers armés du sabre et de la carabine, un certain nombre de lances, et 300 partisans ; 3 bataillons d’infanterie régulière (Jalapa, Vera-Cruz, Cordova). En tout environ 2000 hommes.
Ne disposant d’aucune cavalerie dans la région, nous ignorons tout de cette concentration ; le fait a sa valeur car, dans le cas contraire, il est possible que les événements qui allaient se dérouler eussent été différents.
Repartant de Passo del macho à 2 h 30 du matin, après avoir pris contact avec la compagnie de grenadiers du capitaine SAUSSIER, DANJOU reprend sa marche en même temps que 600 cavaliers du colonel MILLAN sautent en selle pour le suivre, à son insu... le chef mexicain, qui a compté nos hommes, a résolu d’enlever la colonne avant qu’elle ne rejoigne le convoi parti de la Soledad.
Vers cinq heures, la compagnie passe à proximité du hameau de Camerone, pousse une reconnaissance vers l’Est et se rabat vers Palo-Verde où, le jour levé, on fait un repos en halte gardée. Des feux sont allumés pour faire le café, mais à peine l’eau commence-t-elle à bouillir dans les marmites que les sentinelles signalent des cavaliers sur la route de Chiquihuite, celle du retour ? DANJOU prend sa lorgnette : « Aux armes ! L’ennemi ! ».
En quelques instants, les marmites sont renversées, les mulets rechargés, et la compagnie se prépare à faire front. Marchant en colonne par section, prête à toute éventualité, la petite troupe parvient aux abords du village de Camerone d’où soudain part un coup de feu. Un homme est touché, ce sera le premier blessé du combat.
Ce n’est là que la réaction d’une vedette ennemie ; la compagnie poursuit sa marche en direction de Chiquihuite, d’abord sans rien rencontrer, mais bientôt les cavaliers mexicains apparaissent, ils approchent. Massés, ils se séparent en deux colonnes et, sabre à la main, parvenus à soixante mètres, hurlant, ils chargent. Un feu de salve au commandement les bloquent net ; les Mexicains tourbillonnent et prennent du champ, poursuivis par les balles des Légionnaires, le feu ayant continué à volonté.
Un fâcheux incident se produit dans le même temps : effrayés, les deux mulets ruent, se débattent, échappent à leurs conducteurs et filent ventre à terre, vite capturés par l’ennemi. Les vivres pour la journée et la réserve de munitions sont perdus.
Les Mexicains renouvellent les charges à plusieurs reprises, mais plus mollement, DANJOU se dérobant en utilisant la végétation pendant la marche. Il aurait pu continuer sa route, conservant cette même tactique, efficace contre la cavalerie, mais l’hacienda de Camerone qu’il avait remarquée, offrant un point d’appui éventuel pour le convoi de la Soledad, il préfère accepter le combat. C’est l’acte d’un Chef et d’une troupe qui attirent sur eux le principal de l’effort adverse, au bénéfice du convoi qu’ils ont mission de protéger.
Baïonnette au canon, en masse cohérente, les Légionnaires se ruent vers l’hacienda au cri de « Vive l’Empereur ! » et y pénètrent par les deux portes cochères du mur ouest, donnant accès dans la cour intérieure ou corral. Ils bondissent dans la maison, que les Mexicains occupent déjà en partie, soit le hangar extérieur, la chambre du nord-est et tout le premier étage. Les légionnaires ne peuvent prendre possession que de la seule chambre restant libre, à l’angle nord-ouest.
DANJOU répartit ses hommes judicieusement, faisant barricader les deux portes cochères avec des madriers, des planches, des débris de toutes sortes. Faute d’outils, impossible de créneler les murs. Sans aucune vue de l’extérieur, il faudra se borner à interdire l’accès des brèches et le franchissement du mur d’enceinte.
C’est dans ces conditions précaires que soixante-cinq hommes vont tenir dix heures contre un ennemi très supérieur en nombre, brave et entreprenant, et qui les cerne complètement.
NEUF HEURES
Déjà, la chaleur monte tandis qu’une sorte de trêve s’est établie entre les combattants ; du reste les cavaliers mexicains – veste de cuir, pantalons de cheval par-dessus les bottes, éperons embarrassants, sabres, lances et surtout les courtes carabines Spencer sans baïonnettes – ne sont guère armés et équipés pour le combat à pied ; ils comprennent en outre qu’ils ont affaire à des gens qui savent se battre. « Nous attendîmes fièrement l’attaque », a écrit MAINE.
Cependant, l’unique bouteille de vin en possession de l’ordonnance du capitaine DANJOU est partagée entre tous : quelques gouttes à chacun dans le creux de la main. C’est le seul liquide disponible ; toute la journée, la 3e compagnie se battra sans manger et la gorge sèche.
Avant d’engager la lutte, le colonel MILLAN envoie son officier d’ordonnance interpeller le sergent MORZICKI, perché sur le toit en observation ; il s’exprime en français : « Nous sommes plus de 2000, vous n’êtes que 60 ; déposez vos armes ; vous aurez la vie sauve ». MORZICKI descend du toit, rend compte à DANJOU qui le charge de répondre qu’ils ont des cartouches et qu’ils ne se rendront pas. Furieuse, l’attaque se déclenche ; DANJOU se multiplie et donne âme à la défense. C’est sans doute pendant cette phase du combat et avant d’être frappé par la balle qui le tua, qu’il fit promettre à ses hommes de lutter jusqu’à la dernière extrémité. « Nous l’avons juré », a rapporté le caporal MAINE.
Il est environ onze heures quand le sous-lieutenant prend le commandement après la mort du capitaine DANJOU. À ce moment, les trois bataillons d’infanterie de MILLAN arrivent sur le lieu du combat, l’officier mexicain adresse une nouvelle sommation au sergent MORZICKI qui n’en réfère pas à son chef pour répondre « par un mot peu parlementaire et sans équivoque ».
La situation empire. Ayant pratiqué des ouvertures dans le mur et dans le plafond, les Mexicains tuent les défenseurs de la chambre que nous tenions puis, se trouvant maîtres de tous les bâtiments, ils y mettent le feu et se retirent. La chaleur, la fumée rabattue par le vent sur la cour, s’ajoutent aux souffrances de nos soldats.
« Pour les blessés surtout, la situation devient intenable avec cette fumée, jointe à celle de la poudre, et à la poussière... Une écume blanche nous montait aux coins de la bouche et s’y coagulait ; nos lèvres étaient sèches comme du cuir ; notre langue tuméfiée avait peine à se mouvoir ; un souffle haletant, continu, nous secouait la poitrine ; nos tempes battaient à se rompre et notre pauvre tête s’égarait... »
VILAIN ayant été tué vers deux heures de l’après-midi, MAUDET exerçait le commandement avec une énergie égale, mais un commandement purement moral. À cinq heures, il n’a plus que douze hommes en état de combattre. Les attaques cessent soudain et il semble aux défenseurs de Camerone qu’un secours leur arrive. Il n’en est rien : MILLAN a groupé ses hommes et les harangue ; il leur dit qu’étant plus de vingt contre un, ils se déshonorent en ne mettant pas fin à cette lutte par un dernier effort. Les Légionnaires ne perdent pas un mot et l’un d’eux, un Espagnol nommé BARTHOLOTTO, traduit à mesure. Une troisième sommation est faite à laquelle personne ne répond. Alors, tambour battant, clairons sonnant, le flot des Mexicains se rue de toutes parts. MAUDET se trouve bientôt seul avec un caporal et trois légionnaires ; les gibernes ont été vidées ; une dernière salve est tirée, puis, sortant de leur abri, les quatre hommes se jettent, baïonnette en avant sur les mexicains. Mais tous tombent avant de les atteindre ; MAUDET reçoit deux balles malgré le dévouement du Légionnaire CATTEAU qui s’est jeté devant lui pour faire un rempart de son corps et tombe foudroyé, atteint de 19 balles. C’étaient les derniers.
Voici les noms de ces douze hommes : sous-lieutenant MAUDET, sergent MORZICKI, caporaux BERG, MAGNIN, MAINE, Légionnaires BARTHOLOTTO, LEONARD, CATTEAU, WENZEL, CONSTANTI, KUNASSEK, GORSCKI.
« IL EST SIX HEURES DU SOIR, ET LE SOLEIL DESCEND SUR CETTE SCÈNE DE GÉANTS »
Le caporal MAINE, les Légionnaires WENZEL et CONSTANTIN, quoique blessés restent seuls debout. Le colonel mexicain COMBAS arrête à temps la horde d’hommes qui se précipite sur eux ; plein d’égards, il les conduit vers son chef, abattant en chemin un cavalier irrégulier qui s’est rué vers les trois hommes en lâchant sur eux des deux mains, deux coups de pistolet.
« C’est là tout ce qu’il en reste ? », demande le colonel MILLAN en les voyant. Et, il ajoute : « Pero, non son hombres, son Demonios ! », et aussitôt, il donne des ordres pour faire soigner les blessés, faisant preuve d’une attitude chevaleresque qui se maintiendra par la suite.
Sur les 65 combattants, 2 officiers et 22 légionnaires avaient été tués ; 1 officier et 8 hommes mortellement blessés, moururent sur place ; 19 moururent en captivité, de leurs blessures ; 12 hommes presque tous blessés avaient été faits prisonniers ; un seul, le tambour LAÏ fut retrouvé le lendemain du combat (3). Les Mexicains eurent plus de 300 tués, chiffre avoué par eux, mais le chiffre total de leurs pertes devait dépasser 500 hommes.
Parmi les cadavres qui purent être identifiés par le colonel JEANNINGROS le lendemain matin, se trouvait celui du capitaine DANJOU. Il fit prendre la main articulée, en bois. Conservée actuellement au musée du souvenir de Sidi-Bel- Abbès (4), elle représente une des reliques les plus précieuses de la Légion, et, chaque année, lors de la prise d’armes du 30 avril, le coffret qui la contient est tenu par un officier supérieur aux côtés du Drapeau du 1er Étranger.
Pendant tout le temps que l’Armée française demeura au MEXIQUE, par ordre du maréchal FOREY, toute troupe passant auprès de l’hacienda de Camerone faisait front et présentait les armes.
Sur la demande du colonel JEANNINGROS, l’Empereur Napoléon III décida à titre exceptionnel, que le nom de « Camerone » serait inscrit sur le Drapeau du Régiment Étranger (5), et que, en outre, ce nom suivi de ceux de DANJOU, VILAIN et MAUDET serait gravé en lettres d’or sur les murs des Invalides, à Paris.
Enfin, en 1892, un monument fut élevé sur l’emplacement du combat et reçoit une inscription en latin dont le texte « dans la tradition et l’orgueil à la fois simple et lyrique de la Légion » est désormais bien connu :
ILS FURENT ICI MOINS DE SOIXANTE OPPOSÉS À TOUTE UNE ARMÉE. SA MASSE LES ÉCRASA. LA VIE PLUTÔT QUE LE COURAGE ABANDONNA CES SOLDATS FRANÇAIS LE 30 AVRIL 1863.
Camerone ! Il n’est pas un Légionnaire qui ne prononce ce nom avec piété et orgueil.
Camerone ! C’est le symbole des plus hautes vertus militaires ; c’est la folle bravoure, le courage qui se hausse au prodige, le serment tenu jusqu’à l’ultime sacrifice.
HONNEUR et FIDELITE
Fin de citation du Livre d'Or
Notes
1. Les chansons de geste, datent du moyen-âge, et l’une des plus célèbres, est la Chanson de Roland. Ces récits sont, en général, assez longs, ils nous content des exploits héroïques. La chanson de geste était accompagnée par un thème musical simple et répété.
2. Il s’agit de l’exemplaire n° 144, de l’édition originale. Il couvre la période allant de 1863 à 1955.
3. Arrivant le 1er mai sur le lieu de la lutte, le colonel JEANNINGROS y trouva un seul des nôtres encore vivant ; c’était le Légionnaire LAÏ, tambour de la compagnie. Il était percé de sept coups de lance et de deux balles. Laissé pour mort sur le terrain, dépouillé de ses vêtements, il avait manqué être enterré vivant. Ce fut lui qui, le premier, fit le récit du combat de Camerone. Le tambour LAÏ reçut la croix de la légion d’Honneur.
4. Ne pas oublier que ce Livre d’Or a été réalisé en 1958, l’ALGÉRIE était encore française.
5. Cette inscription « Camerone 1863 » figure actuellement sur tous les Drapeaux et Étendards des Régiments Étrangers.
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Camerone 2016 à Diego Suarez |
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Camerone 2016 en Polynésie Française Vendredi, 06 Mai 2016 13:53
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