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ARMEES : Budget, moral des troupes, performance: les mises en garde du chef d'état-major des armées

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Lundi, 12 Novembre 2012

Propos recueillis par Romain Rosso, "Express Défense", publié le 09/11/2012 ...

Alors que s'élabore un nouveau Livre blanc, l'amiral Edouard Guillaud s'inquiète. Pour faire des économies, ne va-t-on pas prendre des décisions irréversibles ne permettant pas à la France d'assurer toutes ses missions de défense?

Quel est l'état de l'armée française?

Il est contrasté. La France dispose d'un bel outil de défense, avec des succès reconnus sur la scène internationale. Alors qu'elles vivent la réforme la plus importante depuis 1962, les armées ont été capables d'exécuter toutes les missions fixées par le gouvernement. En Afghanistan, en Côte d'Ivoire ou en Libye, ce sont des réussites, obtenues dans des conditions difficiles. En Afghanistan, 88 de nos soldats ont vécu leur engagement jusqu'au don de leur vie, et des centaines d'autres y ont été blessés. Peu d'armées au monde sont capables d'intervenir hors de leurs frontières avec une telle efficacité et une telle réactivité. Mais, aujourd'hui, cet outil présente des fragilités qui, dans le contexte économique et financier que nous connaissons, pourraient affecter sa cohérence.

Lesquelles?

Certains matériels nous font défaut. La Libye l'a encore démontré : nous manquons de systèmes de lutte contre les sites antiaériens, de drones et d'avions ravitailleurs. Nos réserves sont trop justement dimensionnées: le niveau des stocks de pièces de rechange et la disponibilité des matériels empêchent de nous inscrire dans la durée. La maintenance des équipements a une incidence sur l'entraînement des personnels.
Nous manquons de systèmes de lutte contre les sites antiaériens, de drones et d'avions ravitailleurs.
Or la performance d'une armée professionnelle suppose un haut niveau de préparation. Je suis chargé de la garantir, sous l'autorité du président de la République, chef des armées. La guerre que l'on imagine est rarement celle que l'on mène. Nous devons envisager une grande diversité de situations, tant en termes de scénarios que de volume de forces engagées. Le contrat opérationnel maximal, fixé par le Livre blanc de 2008, prévoit de projeter sur un théâtre extérieur 30 000 hommes pendant un an et de déployer un groupe aéronaval, ainsi que 70 avions de combat. En l'état, il n'est pas atteignable.

Pour quelles raisons?

La loi de programmation militaire 2009-2014, élaborée sur la base du Livre blanc de 2008, a subi de plein fouet la crise économique. Le budget de la Défense a dévié de sa trajectoire initiale [il a déjà perdu plus de 3 milliards d'euros depuis trois ans].
Or toute discontinuité dans les financements a des impacts stratégiques, opérationnels et industriels qui peuvent être irréversibles. L'unité de temps des programmes d'armement et des ressources humaines, c'est la dizaine d'années. Ne pas en tenir compte fragilise nos armées. A plus long terme, cela risque d'hypothéquer notre aptitude à faire face aux défis stratégiques futurs. C'est pourquoi les prochaines décisions budgétaires ne devront pas céder au leurre du "court-termisme". Cette conjoncture complique davantage encore la réforme du ministère, dont l'échéance était fixée à 2015: en plus d'une redéfinition de la carte militaire et d'une réorganisation complète des soutiens, 54 000 emplois auront été supprimés en sept ans.

Le moral des armées est au "seuil d'alerte", dites-vous...

Le moral est bon lorsque les hommes sont en opération: ils font ce pour quoi ils se sont engagés. L'état-major des armées prête une grande attention à déployer des gens formés, entraînés et équipés. Cela n'empêche pas les inquiétudes sur l'avenir. Le personnel ressent une dégradation des conditions de travail. Il ne perçoit pas toujours la reconnaissance de ses efforts et de ses spécificités.
Le moral des troupes affecte leur combativité
Je rappelle que nous ne sommes pas des fonctionnaires, mais des agents de l'Etat, dont 65% sont sous contrat à durée déterminée, pour une durée moyenne de six à sept ans. Prenons garde à la suraccumulation de réformes, sans laisser le temps de les assimiler: cette "réformite" provoque une véritable lassitude. Aucune institution de l'Etat n'a vécu une mutation d'une telle ampleur et si rapide. Or le moral des troupes affecte leur combativité.

Quelles demandes de Bercy vous paraissent inacceptables ?

Réduire de façon arbitraire l'avancement des militaires n'est pas admissible. Bercy est dans son rôle quand il demande de maîtriser la masse salariale. En revanche, le Budget n'a pas à nous imposer une manière de procéder. C'est la prérogative du ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, qui déploie d'ailleurs toute son énergie pour corriger cette exigence, avec, je crois, un certain succès. Le monde militaire n'est pas le monde civil. La reconnaissance du militaire se fait, pour l'essentiel, à travers son avancement. Quelle administration accepterait qu'on lui dise : l'an prochain, c'est moins 30% ? Tout le monde serait dans la rue !
D'autant que l'argent n'est pas toujours versé en temps et en heure. Que faites-vous pour rattraper les retards dans le versement des soldes?
La mise en service, à l'automne 2011, du nouveau logiciel de traitement des paies, baptisé Louvois, connaît, c'est vrai, des failles sérieuses. Le problème a été pris à bras-le-corps par le ministre: un numéro vert a été ouvert et des audits internes et externes ont été lancés. Si c'est une question de formation des personnels, les problèmes devraient être réglés d'ici à trois mois. Si le logiciel est en cause, ce sera plus compliqué. Nous n'avons pas le droit de nous tromper vis-à-vis de nos hommes. C'est une priorité absolue.

Qu'attendez-vous du prochain Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale?

Le Livre blanc définit les priorités stratégiques de la nation. Il traduit une volonté politique. Ce n'est pas à moi de la déterminer. Je dois cependant veiller à préserver la cohérence de notre outil de défense. Cela signifie que nos moyens doivent rester en adéquation avec nos ambitions. Il en va de la crédibilité de notre pays. Comme membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies, la France conserve une voix qui porte dans le monde. Elle a été habituée à regarder de vastes horizons, terrestres ou maritimes. Veut-on continuer? Et comment devons-nous le faire? C'est à l'autorité politique de le dire. J'attends du Livre blanc qu'il aborde en particulier trois dossiers insuffisamment pris en compte par l'exercice de 2008: l'Afrique, qui connaît une forte expansion démographique, l'outre-mer et les espaces maritimes.

Quelles menaces pèsent sur la France?

La France n'a pas d'adversaire déclaré, au sens traditionnel du terme. Mais ses intérêts sont affectés par des menaces nombreuses, qu'il est préférable de traiter à leur source. Au Sahel, l'instabilité nous inquiète. Les mouvements djihadistes y empêchent le développement des pays et font fuir les populations, au risque de bouleverser les équilibres démographiques régionaux. Ils font aussi peser un risque terroriste, pouvant, à terme, menacer directement la France. De nos jours, la notion de frontière ne s'appréhende plus seulement sous l'angle de la géographie physique. Certaines menaces s'expriment dans des espaces, jusqu'alors moins convoités, comme la mer, l'espace ou la cybernétique. Face à un monde qui évolue très vite, nous devons repenser les modalités de nos réponses.

Paris va-t-il intervenir dans le nord du Mali, désormais aux mains des islamistes?

Le président François Hollande a été clair : la France appuiera la mise en oeuvre de la résolution votée par le Conseil de sécurité de l'ONU, en fournissant un soutien matériel et logistique à une intervention menée par les pays de l'Afrique de l'Ouest. Aller au-delà de cet appui n'est pas à l'ordre du jour.

Traduction

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