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Rwanda : l'incroyable destin d'Angelo

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Publié le 09/04/2014 Par


Juillet 1994. Alors que Kigali vient de tomber dans le giron du FPR, sonnant l'écrasante victoire de l'armée tutsi, Christophe Calais, jeune journaliste à VSD, est envoyé sur le terrain pour suivre les centaines de milliers de civils hutu qui se précipitent sur les routes par peur des représailles. Direction le Zaïre. La marche est longue, les corps sont fragiles, terrorisés, meurtris, et bientôt la réalité dont doit rendre compte Calais s'apparente à l'"apocalypse". Très vite, l'épidémie de choléra est déclarée et, à Goma, les hommes tombent les uns après les autres, charriés par milliers par les bulldozers de l'armée française dans d'immenses fosses creusées pour les ensevelir. Dans la tête du photographe, les questions fusent : comment rendre compte d'un tel drame ? Que faire contre ce sentiment d'impuissance qui tenaille le témoin ? Quel rôle le photographe peut-il jouer dans ce chaos ?

Soudain, au beau milieu du tumulte, un petit miracle interrompt tout questionnement médiatique. Arthur da Dilva, lieutenant dans la Légion étrangère, croit déceler un mouvement dans la masse morbide. Un petit garçon de 15 kg, sans nom et sans âge, vient d'être sauvé de l'enfer zaïrois. Pour tous les présents, il s'appellera Angelo. Un destin rwandais* est l'histoire de ce petit corps rachitique et mourant devenu, près de 20 ans plus tard, un solide gaillard, bien vivant. À plusieurs reprises, Christophe Calais a pensé clore le chapitre, y mettre un point final. Mais à chaque fois, un nouveau bouleversement dans la vie du jeune homme et de sa famille l'invitait à revenir, à suivre leur lent retour dans le monde des vivants.

Ntibagilirwa

Les premières parutions dans VSD connaissent un retentissement imprévu. De nombreux magazines, comme le mensuel Life, relayent les images du petit miraculé, qu'un légionnaire veut adopter et ramener en France. L'émouvante histoire d'Angelo aurait pu s'arrêter là. Mais en juillet 1995, soit un an presque jour pour jour après la découverte de l'enfant, le père, Léonard, reconnaît son fils dans un camp de réfugiés. Le gamin s'appelle en réalité Ntibagilirwa, il a 8 ans et est originaire du village de Mbogo. Sur les indications de Léonard, Christophe Calais et la rédactrice Caroline Mangez prennent la direction du village natal et rapportent à Marie, la mère, l'heureuse nouvelle : son époux et son fils sont en vie. Heureuse de savoir l'enfant sain et sauf, elle insiste pour que les deux reporters mettent en garde son époux : il vaut mieux pour lui qu'il reste au Zaïre.

Qui se cache donc derrière le père aimant et protecteur photographié à Goma ? Quel a été son rôle pendant le génocide ? Il apparaît bien vite que si ces hommes reviennent au Rwanda tous les individus valides pourraient être requis pour mettre sur pied une "armée de libération" destinée à reprendre le pouvoir aux Tutsi du FPR. Une fois le message délivré, Christophe Calais regagne la France. Dans son esprit, les questions se bousculent.

Miracle

Imaginait-il seulement un jour pouvoir y répondre ? Une fois de plus, il avait refermé la page Angelo. Mais en novembre 1996, les bouleversements de la situation politique au Zaïre précipitent de nouveau son départ pour Goma. Les troupes de Laurent-Désiré Kabila avancent sur Kinshasa pour y écraser le régime de Mobutu, marquant un nouvel exode tout aussi spectaculaire que celui de 1994. Seulement, cette fois-ci, les réfugiés, stoppés par les forces de police, sont contraints de rebrousser chemin. Le cliché est poignant. Calais immortalise ces 500 000 Hutu serrés les uns contre les autres dans le brouillard épais de la forêt congolaise, reconduits au pays. Et - est-ce encore un miracle ? - aperçoit Léonard et le petit Angelo au coeur de la foule. "Le lendemain, confie le photographe, toute la famille était enfin réunie à Mbogo et j'étais là pour photographier cet incroyable moment."

Courte trêve. Quelques mois plus tard, Léonard est arrêté et emprisonné : des villageois le suspectent d'avoir participé aux tueries, ce qu'il nie fermement. "À partir de ce jour, je suis retourné tous les ans au Rwanda pour réaliser divers sujets. Et à chaque fois, je prenais le temps de rendre visite à Angelo." Il passe de longs moments avec lui, le suit sur le chemin interminable qui le mène à l'école, dans les lourdes tâches qui composent son quotidien, puis immortalise son mariage, la maison qu'il se construit, sa petite fille de 3 ans... "C'était un reportage et c'est devenu le projet d'une vie, avoue Christophe Calais, visiblement ému. Je vais voir Angelo dès que j'en ai l'occasion. On fait désormais partie de nos vies l'un de l'autre. J'ai hâte qu'il voie le livre." Un récit à rebours, qui d'aujourd'hui à 1994 relate tant le destin d'Angelo que l'histoire du Rwanda. Une course effrénée pour la survie.

* Un destin rwandais, Christophe Calais et Nathan Réra, Les Belles Lettres, 200 pages, 36€


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