Édition du jeudi 30 décembre 2010
A la demande de la rédaction, le patron du 4e R. E., régiment chargé de l'instruction des futurs légionnaires, a réuni des hommes d'origines extrêmement diverses pour débattre du « vivre ensemble » (voir ci-dessus son interview) du racisme, de l'identité.
« S'il y a conflit parmi nous, ce n'est pas une question de nationalité. Je peux préférer un Sénégalais pour son côté travailleur, carré » explique le sergent Oustiagov, russe orthodoxe de Sibérie, en parlant du Sergent Bassène, Sénégalais, musulman, comme lui en formation santé. « J'étais le seul francophone quand je me suis présenté au recrutement. Il y avait un Tchèque, un Roumain, un Algérien. Le seul racisme que je rencontre c'est dans le civil, dans le métro...» répond le Sénégalais. « On juge les gens d'après leurs actes » estime encore le Caporal-Chef Jung, Allemand, protestant. « Il y a moins d'hypocrisie ici qu'ailleurs vous savez », explique ce chiffreur-transmetteur en ajoutant : « La Légion c'est un endroit où les gens qui se tapent sur la tête peuvent se retrouver ». A voir les différents intervenants débattre, on ne peut que constater que le brassage fonctionne.
Un pari qui fait l'originalité de ce corps de l'armée française, intégrant ses soldats par la langue et la philosophie interne de la Légion : « Legio Patria Nostra ».
Servir la France tout en ayant des origines étrangères peut toutefois mener à des cas de consciences, comme le rapporte le caporal Milinkovic, Serbe, orthodoxe : « En 94 ou 95, j'ai été désigné pour aller en Yougoslavie, ça me travaillait un peu. Je connaissais Sarajevo, j'avais de la famille sur le front. Je me suis demandé si je serais en mesure de contrôler mes émotions et de ne pas trahir mes camarades. Le Chef de Corps a montré de la compréhension ». Pour éviter de tels cas de consciences, la Légion s'est imposé une règle unique elle aussi : elle ne peut pas obliger un légionnaire à aller dans un pays dont il est originaire.