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INTERVIEW - Rémi Kauffer 21092010

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Publié le 21/09/2010

INTERVIEW - Rémi Kauffer : " 'Hors-la-loi' est proche de l'imaginaire du film noir américain"

Spécialiste de l'Algérie, l'historien Rémi Kauffer a vu Hors-la-loi. Mise au point sur les épisodes du film sujets à polémique.

Propos recueillis par François-Guillaume Lorrain

 

INTERVIEW - Rémi Kauffer :

Rémi Kauffer, historien, membre du comité éditorial du mensuel "Historia" commente les épisodes polémiques du film de Bouchareb, "Hors-la-loi" © IBO/Sipa

 

Le Point : La reconstitution des émeutes de Sétif, le 8 mai 1945, qui a fait polémique au Festival de Cannes, est-elle exacte ?

 

Rémi Kauffer* : Elle est partiale et partielle. Lors des manifestations de l'Est algérien, convoquées par le parti nationaliste PPA (Parti du peuple algérien), 103 Européens ont été tués. La répression sévira au moins au centuple, menée par la Légion étrangère, les tirailleurs sénégalais et des milices composées de Français d'Algérie. Cette chronologie n'est pas respectée dans le film, puisqu'on y voit la répression débuter à grande échelle avant toute mort d'Européen. Seul élément exact : ce drapeau algérien dans la foule des manifestants, qui met le feu aux poudres.

Y a-t-il eu un combat fratricide sur le sol français entre le FLN et le Mouvement national algérien (MNA) à partir de 1954 ?

Oui. Sur un total de 230 000 immigrés en France, ce combat digne des Atrides a fait près de 4.000 morts et 8.000 blessés ! Le film montre bien qu'au départ, le FLN, le "Front", était minoritaire en France. FLN et MNA constituaient en fait deux rameaux issus de la même branche, le PPA, créé par Messali Hadj, grande figure charismatique encore occultée aujourd'hui. Un dossier explosif pour l'Algérie actuelle, car le MNA, fidèle à Messali, a été éliminé physiquement par le Front, lequel l'a transformé en ramassis de traîtres, vision sommaire qu'accrédite le film. Dans Hors-la-loi, le seul représentant du MNA, un commerçant bien nourri, boit du vin. Or les messalistes étaient d'aussi bons musulmans que les frontistes ! Reste qu'on s'est bien entre-tué dans les lieux de réunion, cafés, hôtels, salles de jeux. Le but était le monopole de l'impôt révolutionnaire, nerf de la guerre. Le Front prend le dessus en 1957, il met même au pas les gangsters algériens. Mieux organisé que le MNA, il bénéficie aussi du prestige de ses maquis en Algérie.

Le FLN a-t-il mené des actions spectaculaires contre la police française ?

Non. On est dans l'imaginaire du film noir américain, voire du film de guerre, quand les résistants tendaient des embuscades aux Allemands. Il est, du reste, impossible qu'un chef de la 7e wilaya, celle de la France métropolitaine, lance une opération commando en tuant de sa main un policier à l'intérieur d'un commissariat, comme le fait Sami Bouajila. Le FLN a bien abattu des policiers, une quarantaine, mais surtout lors d'actions peu ciblées : en terrorisme, on tue ce qu'on peut. Contre les harkis dits "métropolitains" importés d'Algérie par le préfet de police Maurice Papon, le Front a par ailleurs mené une guérilla urbaine violente, mais furtive : rafales de mitraillette ou jets de grenades contre les hôtels où ils vivaient rassemblés, séquestrations, assassinats individuels...

Des policiers d'origine algérienne ont-ils servi d'informateurs au FLN ?

Oui. Il ne faut pas oublier que le Front disposait de moyens de pression terribles sur leurs familles. Comment refuser ? Hors-la-loi le montre d'ailleurs très bien.

Le FLN allait-il s'approvisionner en armes en Allemagne ?

Des trafiquants allemands ont, en effet, ravitaillé le FLN. En revanche, les grosses livraisons ne s'effectuaient pas en France, comme le montre le film, mais en Tunisie, au Maroc, pour la lutte sur le territoire algérien.

Les services secrets français ont-ils monté une organisation criminelle, la Main rouge, pour lutter contre le FLN ?

Oui. En faisant croire à l'existence d'un groupe d'extrême droite, le SDECE, la DGSE de l'époque, a mené des opérations dites "homo" (homicide) contre des trafiquants d'armes pro-FLN et des chefs frontistes. La Main rouge a surtout agi à l'étranger, coulant, par exemple, un bateau rempli de munitions. Mais non par des frappes aveugles, comme on le voit dans le film.

* Historien, membre du comité éditorial d'Historia. Dernier ouvrage paru sur la guerre d'Algérie : OAS. Histoire d'une guerre franco-française (Seuil).

Traduction

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