Le Messager de l'Ouest. Journal de l'arrondissement de Sidi-Bel-Abbès. 081195
Pendant que la Chambre des députés occupe ses loisirs â entendre discourir l'éloquent M. Jaurès sur la grève de Carmaux et donne une fois encore des preuves manifestes ' de son intention de reléguer au second plan les plus sérieuses discussions, — l'interpellation sur Madagascar, par exemple, — le rapatriement, de nos troupes de guerre et de marine continue à s'effectuer dans des conditions déplorables.
Ces jours-ci, l'affrété Canton, venant de Majunga, entrait en rade d'Alger. Pendant la traversée il avait eu 64 décès, soit 31 de moins que le précédent affrété. Ce chiffre de 64 donne les plus sérieuses inquiétudes pour les rapatriements successifs qui vont avoir-lieu et partiront pour la France du 20 novembre au 10 décembre prochain.
Avec tous les pères de famille, nous ne cesserons de répéter que l'administration militaire fait preuve d'une bien fâcheuse incurie en ne prenant pas plus de soins des vaillants soldats qui dans la grande île africaine, au prix de tant d'efforts, ont assuré le succès de nos armes. Il est incontestable, en effet, pour tout esprit réfléchi, qu'avec un peu de prévoyance et d'intelligente sollicitude, une grande partie de ces décès eût été évitée.
Nous ne saurions trop engager le nouveau Ministre de la Guerre à donner des ordres rigoureux pour que les prochains transports de rapatriement se fassent dans des conditions moins mauvaises. De toute nécessité, il faut diminuer le nombre des convalescents qui sont embarqués sur les paquebots et ne plus mettre mille hommes, parmi lesquels trois cents alités sur un navire où ne tiendraient peut-être pas à l'aise cinquante passagers ordinaires...
Avons-nous tort de faire appel aux sentiments d'humanité de M. le Ministre de la Guerre ? Nous ne le croyons pas, et avons même la conviction que cet honorable membre du gouvernement comprendra que l'unanimité des Français a les yeux tournés vers Madagascar, que les pères et mères de famille ne songent qu'à leurs enfants et que seule une infime minorité de politiciens s'intéresse aux discussions plus ou moins stériles qui ont lieu actuellement à la Chambre.
M. F,