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Aux Glorieuses… les 1ères PHOTOS des Eparses

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12/04/2014 · 17:33

Les communications sont difficiles depuis le Marion Dufresne, pas de connexion instantanée pour poster ses images "à la minute", pas de cabine téléphonique pour laisser facilement quelques nouvelles…
Pourtant François a pu aujourd’hui nous envoyer quelques photos prises sur l’île des Glorieuses, la première escale de cette rotation le 9 avril dernier.
Pour accompagner cette sélection de photographies, nous avons le plaisir de vous partager un texte, celui de Caroline Britz, journaliste marine, qui nous fait le privilège de nous confier ses écrits.


De l’art de faire cohabiter les tortues et la Légion

La pauvre tortue verte a bien du mal. Hier soir, elle a franchi le lagon de Glorieuses, pour venir pondre, bien à l’abri dans les dunes de sable blanc de l’île. « Elle est allée trop loin, elle a passé la dune, et là elle est perdue, elle n’arrive pas à revenir à la mer ». Thomas, jeune biologiste marin, observe ses tortues depuis près de trois mois. Il a sorti son mètre ruban. « C’est une grosse tortue, elle doit être vieille ». Elle se débat, panique un peu, a trop chaud, s’affole de tous ses humains autour d’elle.

Le gendarme Delaunay la regarde avec inquiétude. Tous les matins, le seul détenteur de l’ordre public à Glorieuses fait le tour de l’île avec Thomas. 8 km dans le sable, à vérifier les abords de l’archipel, l’éventuelle présence, non autorisée, de pêcheurs. Mais aussi les traces faites par les tortues quand elles se hissent, à la nuit tombée dans les dunes, et celles qu’elles laissent quand elles regagnent leur élément au petit matin. Il sait où Thomas a placé ses grillages pour observer les petits après l’éclosion ; et où il relève ses températures dans les nids pour faire des statistiques sur le sex-ratio. Le gendarme Delaunay n’y connaissait pas grand’chose aux tortues. Mais là, il s’inquiète pour la vieille dame et lui verse de l’eau sur le cou.

« Vous avez besoin d’aide, il faut la soulever ? » L’équipage de l’avion Transall de l’armée de l’air a retroussé sa combinaison de vol. Ils sont arrivés ce matin de la Réunion pour apporter un nouveau groupe électrogène au camp de Glorieuses. Venus aux nouvelles, ils ont rejoint le groupe affairé à baliser le chemin de la plage pour la tortue. Thomas et Cédric, le directeur de la réserve naturelle, ne sont pas très chauds pour la brusquer en la transportant à bras d’hommes vers l’eau.
Alors, on l’aide. On écarte les veloutiers qui bordent la plage. On remplit des bouteilles d’eau pour la rafraîchir. Elle franchit la dune, elle doit sentir l’air marin, le courage lui revient. Un dernier effort, la prochaine brasse sera dans l’eau. Revenue à son élément, elle s’éloigne sans demander son reste. Mission accomplie et soulagement général.

« Alors la tortue ? » Le capitaine Franck Alliot a un béret vert sur la tête, le visage tanné et affuté et un grand sourire. Le capitaine Alliot est légionnaire et c’est lui qui commande le camp. Depuis 1967, c’est le détachement de la Légion étrangère de Mayotte qui assure la souveraineté, c’est-à-dire la présence de la République, sur Glorieuses. 14 militaires, en plus du gendarme, se relaient tous les 40 jours. Pas toujours des légionnaires, puisqu’il s’agit de compagnies tournantes. Mais la coordination de la présence militaire est sous l’autorité de la Légion. Régulièrement, le capitaine Alliot vient depuis Mayotte se rendre compte de la bonne exécution de ses ordres et de la bonne tenue du camp.

« Le casernement sera toujours net ». Le principe de la Légion est appliqué à la lettre ici, le carrelage de la terrasse est impeccable, les chemins sont balisés par des cocos, le système de filtrage d’eau récemment remis à neuf, les lits picots soigneusement empilés dans l’abri anti-cyclonique. « Régulièrement, je mets les hommes de corvée chinoise. Comme en Chine, où les employés, pendant une journée, nettoient leur entreprise de fond en comble. Ici je les fais ratisser toutes les brindilles dans les allées de la cocoteraie. Sinon, en deux semaines de saison des pluies, c’est la jungle ».

« On est là parce qu’on est des combattants, on doit défendre l’île. Mais on peut décliner nos compétences. Le légionnaire est un bâtisseur. Et il n’arrête jamais de travailler ». Les poubelles sont triées, rien ne traîne, la nature s’épanouit, personne ne dérange les animaux. Le capitaine Alliot a bien volontiers mis en pratique les principes de conservation de la faune et la flore de la réserve naturelle qu’est devenue Glorieuses. « C’est une mission bien éloignée de celles que j’ai pu avoir sur des théâtres d’opérations militaires, mais je l’exécute avec la même rigueur ». Et visiblement avec beaucoup de plaisir.

Dans la cocoteraie, le temps s’est arrêté. Le capitaine Alliot retrouve sa « cathédrale ». Celle où il venait lire ses romans d’aventure, il y a plus de 20 ans, la première fois qu’il est venu en mission sur l’île. « Il y a encore un côté aventurier sur cette île, qui est en même temps exceptionnellement préservée. C’est pour cela que j’ai voulu casser tout ce qui était en béton, faire évoluer le camp vers des matériaux naturels comme bois. Redonner à l’île son caractère unique et rustique »

Le légionnaire ne pleure pas ses morts, il les honore. Le capitaine Alliot n’oublie jamais de se rendre au cimetière de Glorieuses, au bout de la cocoteraie. Là où sont enterrés ceux qui ont perdu la vie ici au début du 20ème, ouvriers malgaches de l’exploitation de coprah d’Hippolyte Calto, puis dans celle qui traitait le phosphate du guano. Leurs enfants aussi. Celestine, 16 ans. « Un arbre est tombé sur les tombes. Mes légionnaires ont décidé de déplacer le tronc et de refaire toutes les tombes avec des pierres chaulées ». Un autre a sculpté une entrée digne de ce nom au petit cimetière. « Ce sont eux l’histoire de Glorieuses, ne l’oubliez pas ».

Le capitaine Alliot va quitter son poste. Il passe sa dernière journée sur Glorieuses. Une dernière fois, il va s’asseoir à la grande table sous le carbet. Ouvrir, pour les invités, une bouteille de Puyloubier, le vin des légionnaires. Regarder le Transall décoller sur la petite piste. Taper sur l’épaule de Thomas, le jeune scientifique. « Et alors cette tortue ». « Sauvée ». « Bien »


Traduction

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