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Hartung et les peintres lyriques aux Fonds Leclerc : liberté et singularité

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Par Thierry Hay Publié le 15 décembre 2016

Hans Hartung : Acrylique sur panneau de bois aggloméré, 1983. 111 cm x 180. Fondation Hartung-Bergman, Antibes / Adagp, Paris 2016

Les Fonds pour la Culture Hélène& Edouard Leclerc, présente jusqu’au 17 avril 2017, de nombreux artistes lyriques dont le célèbre peintre allemand Hans Hartung, un artiste qui n’a jamais cessé de se renouveler. Hartung est aujourd’hui considéré comme le maître de l’abstraction lyrique. Une présentation qui ne manque pas de fulgurances. A voir.


Enfant, Hans Hartung était fasciné par les orages et les éclairs. Il essayait des les dessiner, de les capturer, sur ses cahiers d’écoliers. Sans le savoir, il dresse, à cet âge, les piliers de ce que sera sa démarche artistique : l’envie d’illustrer l’impalpable, les forces surnaturelles et la pratique de la vitesse, sans oublier son obsession de liberté :  » Quant à moi je veux rester libre, d’esprit, de pensée, d’action. Ne pas me laisser enfermer par les autres ni par moi-même  » a affirmé toute sa vie l’artiste. Malgré cette déclaration, les experts, toujours prompts à ranger les créateurs dans des cases, l’ont qualifié de père de l’abstraction lyrique, pourquoi pas… Pour moi, Hartung a réussi, dans son art, à mélanger rigueur et fulgurance, une sacrée prouesse. Il est un des artistes, très importants, du XXe siècle. Cette exposition aux  » Fonds pour la Culture Hélène & Edouard Leclerc est donc un événement.

Hans Hartung : Vinylique sur toile, 1963. 180 cm x 142. Fondation Hartung-Bergman, Antibes / Adagp, Paris 2016

Hans Hartung : Vinylique sur toile, 1963. 180 cm x 142. Fondation Hartung-Bergman, Antibes / Adagp, Paris 2016

Dresde et les Baléares

Hans Hartung naît le 21 septembre 1904 à Leipzig. Son père médecin est muté à Dresde, c’est là qu’il fait ses études. Au lycée, il se passionne pour Rembrandt et Goya. Dès 1922, il réalise, en ignorant tout des développements de l’abstraction en Europe, ses premières aquarelles abstraites. En 1926, il visite à Dresde, une exposition sur le fauvisme et le cubisme. La multiplicité et la force des couleurs le frappent. La même année, il effectue son premier voyage à Paris, puis, il voyage dans le sud de la France. En 1929, il rencontre, à Paris, une jeune peintre norvégienne :  Anna-Eva Bergman. Il l’épouse. Il expose dans des galeries à Berlin et à Paris. Il s’installe aux Baléares (Minorque), mais les problèmes d’argent ne tardent pas à venir.

Les nazis et la légion étrangère

En 1935, lors d’un voyage à Berlin, il est interrogé par la Gestapo. Il décide de se rendre seul à Paris. Là, son atelier est voisin de celui d’Henri Goetz. Les deux hommes se lient d’amitié. Il rencontre Vassily Kandinsky, Piet Mondrian, César, Joan Miro. Il divorce avec Anna-Eva Bergman et passe beaucoup de temps chez le sculpteur Julio Gonzales, il réalise même une sculpture. Il multiplie les expositions dans différentes galeries et épouse Roberta Gonzales, la fille de son ami sculpteur. Mais l’histoire le rattrape en 1939, désireux de lutter contre le nazisme, il s’engage dans le légion étrangère. Il est brancardier en Afrique du Nord. En 1944, il est blessé lors de l’attaque de Belfort. Il est amputé de la jambe droite. Il est naturalisé français en 1946. Un an plus tard, une exposition à la galerie Lydia Conti le révèle aux critiques et au public parisien. Alain Resnais réalise un film intitulé  » Visite à Hans Hartung « . En 1952, une rétrospective de son œuvre est organisé au musée de Bâle, où il retrouve une vielle connaissance : Anna-Eva Bergman. Il divorce de Roberta Gonzales et épouse à nouveau Anna-Eva Bergman. En 1960, il reçoit le grand prix international de peinture de la Biennale de Venise, ce qui n’est pas rien. Désormais, la reconnaissance est mondiale et il expose dans de nombreuses capitales. Epuisé, malade, Hans Hartung meurt le 24 juillet 1987. Selon sa volonté, ses cendres sont dispersées dans la Méditerranée.

Du tachisme à la calligraphie jubilatoire

Toute sa vie, Hartung a multiplié et fait évolué ses techniques créatives. Dès 1931, l’abstrait prend le pas sur le figuratif. Entre 1934 et 1938, il réalise une série intitulée  » tâches d’encre « . Comme il n’a pas beaucoup de moyens, il s’installe aux terrasses des bistrots et commande un café. Cela lui permet, ensuite, de demander de l’encre et du papier. Il dessine, les yeux fermés, des tourbillons d’encre noir. A cette époque, il met au point le procédé du report. Il reproduit en peinture, des dessins exécutés spontanément. Il utilise ce système jusqu’en 1959. En observant cette œuvre, je sens bien qu’ Hartung veut relier ou opposer des forces vives. Dès sa jeunesse, il s’intéresse à la spiritualité, il y a dans cette création une notion de traces qui, par leur énergie, sont capable de dépasser le temps et de suggérer l’essentiel de la vie. Mais attention : l’artiste n’a aucun message à donner, aucun symbolisme à affirmer, pas plus qu’il ne cherche la moindre séduction visuelle. C’est la force du geste qui l’intéresse. Ici, Hartung cultive un équilibre instable. Cette toile me fait penser à un mobile de Calder.

Hans Hartung : Huile, craie noire et pastel sur toile écrue, 1937. 97 cm x 130. Fondation Hartung-Bergman, Antibes / Adagp, Paris 2016

Hans Hartung : Huile, craie noire et pastel sur toile écrue, 1937. 97 cm x 130. Fondation Hartung-Bergman, Antibes / Adagp, Paris 2016

Harmonie et équilibre

En 1957, il se lance dans une série de pastels, cette création en est un exemple. Plusieurs tourbillons se rencontrent pour former une diagonale, où le mouvement courbe, en haut à gauche équilibre la petite flèche située en bas à droite.

Hans Hartung : pastel et fusain sur papier, 1957. 50 cm x 65. Fondation Hartung-Bergman, Antibes / Adagp, Paris 2016

Hans Hartung : pastel et fusain sur papier, 1957. 50 cm x 65. Fondation Hartung-Bergman, Antibes / Adagp, Paris 2016

Expérimentations

En 1961, il commence une nouvelle phase esthétique, il se sert du procédé de pulvérisation et n’hésite pas à gratter sa toile. Il fabrique également ses pinceaux : larges brosses, pistolets, balais de genêts, tuyaux d’arrosage et rouleaux de typographe. Tous ces outils, toutes ces techniques qui ont traversé sa vie, sont toujours au service de l’expression et de l’émotion. Cette superbe toile l’illustre à merveille. C’est un accord de musique, une cascade, un souffle violent, tout à la fois. Elle révèle une force et une amplitude incroyable, un équilibre dans le déséquilibre. Oui, là, on est vraiment dans l’expression lyrique. Et j’adore ce bleu intense :

Hans Hartung : acrylique sur panneau de bois aggloméré, 1975. 102 cm x 130. Fondation Hartung-Bergman, Antibes / Adagp, Paris 2016

Hans Hartung : acrylique sur panneau de bois aggloméré, 1975. 102 cm x 130. Fondation Hartung-Bergman, Antibes / Adagp, Paris 2016

Mouvements

Ce gout de la liberté, de l’ampleur du geste, de son immédiateté, sans perdre de vue pour autant la nécessité d’une composition stricte, Hartung le pratique dès les années 60, mais c’est surtout à la fin de sa vie qu’il le pousse à l’extrême. Ce vieil homme handicapé cogne, frappe la toile. Il la bat avec des balais de végétaux. Il multiplie les procédés de dilutions. Il veille à se renouveler sans cesse. Bien que peignant dans un fauteuil, son geste gagne encore en amplitude. Il met tout ce qu’il lui reste de force dans la bataille.  » L’art me paraît être un moyen de vaincre la mort  » affirmait Malraux« … Cette toile comporte une multitude de cheminements mentaux, l’expression du  » chemin  » noir est frappante.

Hans Hartung : acrylique sur toile, 1989. 180 cm x 180. Fondation Hartung-Bergman, Antibes / Adagp, Paris 2016

Hans Hartung : acrylique sur toile, 1989. 180 cm x 180. Fondation Hartung-Bergman, Antibes / Adagp, Paris 2016

Démarches lyriques

Si Hartung est la star de cette exposition, elle ne se limite pas à lui. D’autres artistes de l’abstraction lyrique sont présentés. Il ne faut pas oublier, que ce mouvement artistique compte une grande diversité. Cette toile de Sigmar Polke est bien différente de celles d’Hartung. Polke y pratique une juxtaposition d’effets et de cadres. Cette pratique est aujourd’hui très à la mode chez les jeunes artistes.

Sigmar Polke : sans titre, 2007. Technique mixte sur toile, 180 cm x 150. Siegen / The Estate of Sigmar Polke, Cologne / Adagp, Paris 2016

Sigmar Polke : sans titre, 2007. Technique mixte sur toile, 180 cm x 150. Siegen / The Estate of Sigmar Polke, Cologne / Adagp, Paris 2016

Hartung, Polke, Traquandi, Oehlen etc. Tous ces peintres abstraits expressifs, sont des artificiers de l’émotion. Dépassant les modes, chacune de leurs œuvres est un court-circuit sensible et harmonieux. Avec une énergie gigantesque, ils ont su créer une nouveau langage, compréhensible par tous. J’aime cette peinture totalement libre, entièrement consacrée à l’expérimentation, avec un engagement total du corps. Depuis la Fondation Maeght en 2008, Hartung n’avait pas bénéficié d’une grande présentation en France, une raison de plus pour ne pas rater cette exposition. Chacune des oeuvres de Hartung est une boîte de lumière qui éclaire  les esprits.

Fonds Hélène & Edouard Leclerc pour la Culture : couvent des Capucins, 29800 Landernau

Du 11 décembre au 17 avril 2017 : ouvert de 10h à 18h

Entrée : huit euros

Par Thierry Hay


Traduction

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